Anora de Sean Baker remporte la Palme d’Or 2024

Sean Baker remporte la palme d’or pour son film Anora lors de l’édition 2024 du Festival de Cannes. Une plongée dans le monde sulfureux du sexe tarifé et des oligarques avec une révélation : l’actrice Mickey Madison.

 

Ce samedi 25 mai, le 77e Festival de Cannes a décerné la Palme d’Or à Anora du réalisateur américain Sean Baker. Une surprise pour les festivaliers à la grande satisfaction d’une partie de la critique, signée par l’imprévisible présidente du jury et réalisatrice du film Barbie, Greta Gerwig. Un Prix remis des mains de George Lucas, réalisateur à l’origine de la saga Star Wars.

 

Le film succède ainsi à « Anatomie d’une Chute » de Justine Triet, récompensée l’année dernière.

 

Les Etats-Unis n’avaient pas remporté la récompense suprême depuis The Tree of Life de Terrence Malick en 2011.

 

Une cendrillon des temps modernes

 

L’histoire d’Anora, une comédie sociale conçue comme un thriller, suit les péripéties d’une travailleuse du sexe – sorte d’escort girl du quartier de Brooklyn à New York, interprétée par l’actrice américaine Mickey Madison.

 

Au cours d’une soirée arrosée dans un nightclub, la jeune américaine russophone, rencontre en Vanya, fils d’un oligarque russe, son prince charmant. Après avoir loué ses services, le jeune homme éprouve un début de passion dévorante et un mariage est improvisé dans la foulée à Las Vegas.

 

Un prêtre orthodoxe, proche du jeune homme, désavoue cette union et fait part de la situation à sa richissime famille. Furieux, les parents, bien décidés à faire annuler le mariage, débarquent en urgence à New York. Le film bascule alors dans une comédie de l’absurde qui rappelle After Hours de Martin Scorsese (1995).

 

Alternant entre bas-fonds et villas ultra luxe, le film n’en reste pas moins lumineux avec ses protagonistes foncièrement humains.

 

Mark Eydelshteyn et Mickey Madison, alias Yvan et Anora, se marient rapidement à Las Vegas dans Anora (2024) de Sean Baker © Neon/Le Pacte

 

A l’inverse, l’Amérique apparaît comme un monde corrompu par l’argent et le sexe, le pouvoir religieux comme oppressif et la caste des grandes fortunes comme suffisante et méprisante. Ce portrait au vitriol n’est pas sans rappeler un autre film primé deux ans plus tôt : « Triangle of Sadness » (Sans Filtre en VF) du réalisateur suédois Ruben Ostlund.

 

Le film révèle l’actrice Mickey Madison, déjà aperçue dans la série « Better Things » ainsi que dans le film de Quentin Tarantino « Once Upon A Time In Hollywood ». Dans ce dernier, l’actrice y interprétait une des groupies fanatiques du clan du sinistre Charles Manson.

 

De son côté, Greta Gerwig, la présidente du jury a déclaré “ce film est magnifique et rempli d’humanité. Il nous a permis de rire et désespérer au-delà de l’espoir.”

 

Un adepte de la transgression

 

Pour Sean Baker, réalisateur de 53 ans repéré avec « Tangerine » au Festival du Film Américain de Deauville, cette troisième venue à Cannes s’apparente à une véritable consécration. Après une première présentation à Cannes de « Florida Project » à la Quinzaine des réalisateurs, en 2017, il avait vu son “Red Rocket” nommé pour la Palme d’Or en 2021 sans toutefois la décrocher.

 

La troisième virée cannoise aura donc été la bonne.

 

Avec Anora, le réalisateur poursuit sa réflexion sur des sujets controversés liés à la sexualité et plus particulièrement dans un monde où le sexe est présenté comme un outil de travail. Sean Baker a d’ailleurs dédié son prix “à toutes les travailleuses du sexe passées, présentes et futures.”

 

En recevant le Prix des mains du père de Star Wars et d’Indiana Jones entre autres, Georges Lucas, 80 ans, le lauréat a déclaré : “cette Palme d’Or est tout ce dont je rêvais. […] Maintenant je vais continuer à lutter pour que le cinéma reste vivant et sorte dans les salles.”

 

“Dans une salle de cinéma, on partage la tristesse, le rire et l’effroi avec ses amis et son entourage. L’avenir du cinéma est là où il a commencé, c’est- à-dire dans une salle de cinéma.”

 

Autres primés

 

Emilia Perez, film de Jacques Audiard produit par Saint Laurent Production n’est pas en reste. Le film a obtenu le prix du Jury, tandis que ses quatre interprètes ont reçu ex-aequo le Prix de l’interprétation féminine.

 

Pressenti comme Palme d’Or, Les Graines du Figuier Sauvage, film réalisé clandestinement  par le réalisateur iranien dissident Mohammad Rasoulof, a été récompensé par le Prix Spécial du Jury.

 

Moins chanceux mais toute aussi chargé en émotion, La Plus Précieuse des Marchandises, film d’animation signé Michel Hazanavicius, a tout autant enchanté la Croisette.

 

Palmarès Complet de la 77e édition du Festival de Cannes

 

Palme d’Or : Sean Baker pour “Anora”

 

Grand Prix : Payal Kapadia pour « All We Imagine as Light »

 

Prix du Jury : Jacques Audiard pour “Emilia Perez”

 

Prix de la mise en scène :  Miguel Gomes pour “Grand Tour”

 

Prix spécial du Jury : Mohammad Rasoulof pour « Les Graines du figuier sauvage »

 

Prix d’interprétation féminine : Karla Sofia Gascon avec Selena Gomez et Zoe Saldana ex-aequo dans “Emilia Perez” de Jacques Audiard

 

Prix d’interprétation masculine :  Jesse Plemons dans « Kinds of Kindness » de Yorgos Lanthimos

 

Prix du scénario : Coralie Fargeat pour “Substance « 

 

Caméra d’or : Halfdan Ullmann Tøndel pour « Armand »

 

Mention spéciale du Jury de la Caméra d’or : Chiang Wei Liang pour  “Mongrel”

 

Palme d’or du court métrage : Nebojša Slijepcevic pour  « The Man Who Could Not Remain Silent »

 

Mention spéciale du court métrage : Daniel Soares pour “Bad For a Moment”

 

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Photo à la Une : © Festival de Cannes

Victor Gosselin est journaliste spécialisé luxe, RH, tech, retail et consultant éditorial. Diplômé de l’EIML Paris, il évolue depuis 9 ans dans le luxe. Féru de mode, d’Asie, d’histoire et de long format, cet ex-Welcome To The Jungle et Time To Disrupt aime analyser l’info sous l’angle sociologique et culturel.

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