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Bardot : France Télévision consacre une mini-série à l’icône glamour des sixties

Bardot : France Télévision consacre une mini-série à l’icône glamour des sixties

Blondeur incendiaire, visage faussement ingénu, cheveux ébouriffés, moue boudeuse et regard de braise, Julia de Nunez est Brigitte Bardot. Avis à tous les ex-fans des sixties, BB, l’actrice du Mépris et toute première starlette française, fait l’objet d’une mini-série réalisée par Danièle et Christopher Thompson pour France Télévision, sur vos écrans depuis le 8 mai.

 

Et Bardot créa la flamme

 

Les américains avaient Elizabeth Taylor, la France a eu Brigitte Bardot. Autrement dit, la star internationale ou plutôt l’icône totale. Une personnalité nonchalante à l’esprit libre qui, par ses frasques, a suscité autant l’admiration que l’indignation.

 

Amoureuse de l’amour, Brigitte Bardot s’adonne au polyamour, bien avant qu’il soit plébiscité par l’actuelle génération Z. De nouveau en avance sur l’époque, elle questionne la maternité durant des Trentes Glorieuses balbutiantes, à l’esprit encore corseté. Elle n’hésite pas à recourir à l’avortement, geste hautement symbolique pour la période et plus encore aujourd’hui alors que ce droit est remis en cause dans une vingtaine d’Etats américains.

 

 

Comment Brigitte est devenue le mythe BB, apparition fantasmagorique du cinéma de la Nouvelle Vague et figure matricielle de l’émancipation féminine ?

 

C’est ce que cherche à décrypter la nouvelle série Bardot en six épisodes avec Danièle et Christopher Thompson – mère et fils – derrière la caméra.

 

Cette coproduction franco-italienne revient sur les années 1949-1960, période prolifique d’une Bardot cinématographique marquant l’ascension fulgurante de la star.

 

On suit ainsi de manière chronologique une jeune fille de 15 ans rêvant de devenir danseuse, suffoquant dans une famille bourgeoise du XVIe arrondissement de Paris, jusqu’à ses 26 ans et sa tentative de suicide dans sa maison de la Madrague à Saint-Tropez.

 

Une Bardot qui cesse d’être Brigitte avec le très transgressif – pour l’époque –  Et Dieu… créa la femme (1956). Le film fait accéder l’actrice au statut de sex symbol et préfigure la révolution sexuelle de 1968. C’est également cette œuvre qui met en pleine lumière un petit port de pêche du Var, jusqu’ici prisé des impressionnistes : Saint-Tropez.

 

Tournage de la série Bardot à Saint Tropez © France Télévision/Federation Studios/Thibault Grabherr

 

Le tournage de la série s’est d’ailleurs notamment déroulé sur la plage de la Ponche, un des lieux mythiques du film de Roger Vadim, qui fut l’un des premiers à privilégier les plans en extérieur.

 

Instantané solaire de la parisienne, elle ose la marinière et les ballerines Repetto, est autant à l’aise avec les robes à motifs vichy de Jacques Esterel qu’en mini-short et cuissardes.

 

Autant d’éléments inspirants qui justifient son adaptation en série.

 

Une Brigitte plus vraie que nature

 

C’est l’histoire d’une jeune fille qui comme les autres cherche l’amour et la réussite mais dont les rêves se fracassent contre l’hystérie qu’elle déchaîne.” C’est ainsi que la co-réalisatrice de cette série sur la jeunesse de BB évoque le projet.

 

Il aura fallu quatre ans à Danièle Thompson et son fils Christopher pour écrire et penser cette adaptation. En effet, la co-scénariste de la Grande Vadrouille de Gérard Oury (1966) et de la Boum de Claude Pinoteau (1980) ainsi que réalisatrice de films comme la Bûche (1999) et Fauteuils d’orchestre (2005), a longtemps hésité à porter le projet.

 

Car tout portait à croire que tout a déjà été dit sur l’actrice mythique, connue aussi bien en France qu’outre Atlantique. Mais c’était sans compter sur son intimité (volée) et son sentiment de grande solitude qui entrent en résonance avec notre époque à la fois hyperconnectée et isolée.

 

Puis l’idée même de filmer l’évolution d’adolescents dans une culture jeune en pleine construction, finit par séduire la réalisatrice qui y voit matière à une écriture romanesque.

 

Agée de 81 ans, Danièle Thompson a en effet également vécu l’expérience de la condition féminine vécue par Brigitte Bardot, de 8 ans sa cadette, durant – les très conservatrices – années 50.

 

Soucieuse de reproduire à l’écran la sincérité de cette femme indomptable, Danièle Thompson réalise de nombreux entretiens avec des témoins de l’époque et des intimes de la star. Et elle lit par ailleurs surtout les biographies de celles et ceux qui ont partagé une partie de la vie de BB, à savoir celles de son agente Olga Horstig, du producteur Raoul Lévy ainsi que du réalisateur Roger Vadim.

 

Un casting cinq étoiles commence alors à se préciser avec dans le rôle des parents de Brigitte Bardot, Géraldine Pailhas et Hippolyte Girardot.

 

Le solaire Victor Belmondo incarne Roger Vadim, réalisateur et premier amour de Bardot, tandis que le prometteur Noham Edje, tout en retenue, incarne Jean-Louis Trintignant. De son côté, Yvan Attal campe Raoul Lévy, le producteur de “Et Dieu… créa la femme”. Anne le Ny incarne quant à elle son agente, Olga Hostig.

 

Reste, l’élément sine qua none à la réussite d’un tel projet : qui va incarner BB ?

 

Julia de Nunez interprète Brigitte Bardot © France Télévision/Federation Studios

 

Le choix finit par se porter sur Julia de Nunez. Il s’agit d’une actrice de 20 ans, inconnue du grand public et tout juste diplômée de l’école d’art dramatique privée Périmony.

 

Une école de théâtre qui a vu passer, entre autres, Fanny Ardant, Sabine Azéma, Marlène Jobert, François Cluzet ou encore Camille Cottin.

 

La jeune comédienne a été choisie tant pour sa ressemblance physique troublante – au point que ses amies lui offraient des posters de l’actrice – que pour la finesse de son interprétation. Et en la matière, si l’interprète principale arrive à reproduire sa moue boudeuse, sa voix traînante et son accent si particulier, elle livre une prestation franche et sans fard, à la hauteur de l’enjeu. 

 

Fascinée par son interprétation dans le film La Vérité de Henri-George Clouzot autant que bercée par ses chansons,l’interprète principale de la série évoque d’ailleurs l’inspiration majeure qu’a eu Brigitte Bardot dans l’orientation de sa carrière de comédienne.

 

Et de musique, il en est question car Brigitte Bardot a interprété plus de 70 titres écrits et composés par des pointures de l’époque tels que Jean-Max Rivière, Gérard Bourgeois, Jean Fredenucci ou bien sûr Serge Gainsbourg. L’idylle de ce dernier avec l’actrice lui inspirera le très symphonique Initials BB (1968), librement inspiré de la symphonie n°9 d’Antonín Dvořák ou encore le désarmant et langoureux “Je t’aime… moi non plus”, qui sera finalement interprété par Jane Birkin. Le titre fait d’ailleurs l’objet d’une séquence dans le film Gainsbourg Vie Héroïque de Joann Sfar (2010) avec Laetitia Casta dans le rôle de BB.

 

Arthur Simonini, qui avait notamment signé la bande son du Portrait de la jeune fille en feu, film sensation à Cannes en 2019, propose un hommage appuyé à cet univers rêvé du double B, où l’on retrouve tout à la fois magnificence, candeur et rayons ardents de Saint Tropez.

 

Le seul générique offre une musique somptueuse mêlant une orchestration sculpturale faite de cordes, piano et xylophone et réminiscences sixties versant dans le rock, période Harley Davidson. Le reste fait revivre les grandes heures de la nouvelle vague, celles de Jean-Luc Godard et de Louis Malle, avec des variations du thème principal tour à tour intimiste et jazzy ou film noir.

 

Et BB choisit… d’être out

 

La série fait le choix de s’arrêter en 1960, année de naissance de son fils Jacques-Nicolas Charrier qui s’entrechoque avec l’hystérie déclenchée quelques années plus tôt par le film de Roger Vadim, Et Dieu… créa la femme. L’actrice n’a alors que 22 ans.

 

Un film charnière dans l’histoire de Bardot qui reste dans les mémoires à tort comme le point de départ de sa carrière au cinéma, alors même qu’elle a alors déjà une douzaine de films à son actif.

 

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Scène culte du film Et Dieu… créa la femme de Roger Vadim © Cocinor

 

Avec l’exposition de son corps lascif et de sa danse (trop) libre, le film est accueilli très frileusement à sa sortie en décembre 1956 en France par les spectateurs comme par la critique. Interprétant Juliette, Brigitte Bardot fait tourner les cœurs sur le plateau comme à la ville de Roger Vadim et de Jean-Louis Trintignant. Il faut dire que Vadim propose quelque chose d’avant-gardiste : un personnage féminin qui exprime ses désirs, sa sexualité et sa liberté… comme les hommes.

 

Ce n’est qu’après avoir été adoubé par le marché américain, qui le distribue dans plusieurs villes américaines – une première pour un film français – que ce dernier devient un phénomène de société.

 

Le philosophe Roland Barthes consacre même quelques lignes à ce “feuilleton national” naissant dans son ouvrage référent Mythologies paru en 1957 : “Elle représente un érotisme plus ouvert, dépouillé de tous ces substituts faussement protecteurs qu’étaient le semi-vêtement, le fard, le fondu, l’allusion, la fuite.”

 

Ce phénomène oblige la star à accoucher et vivre cloîtrée au 7e étage du 71 de l’avenue Paul-Doumer, à Paris. Ainsi, bien avant Lady Diana ou Britney Spears, Brigitte Bardot fait l’expérience douloureuse du star-system. Le mot paparazzi (« moustique bruyant »), dérivé du personnage Paparazzo, photographe sans scrupules et allié de Marcello Mastroianni dans un autre film à scandale – La Dolce Vita de Federico Fellini (1960) – vient alors d’apparaître.

 

L’image de Bardot façonnée malgré elle par Roger Vadim tel Pygmalion et sa Galatée – mi femme enfant, mi-femme fatale – finit par échapper à Brigitte.

 

Traquée par les photographes, de la Croisette jusque chez elle à la Madrague, menacée par les femmes qui voient en elle une rivale qui n’en finit pas de “prendre tous leurs hommes”, l’actrice est à bout de souffle.

 

Un reportage sur les bébés phoques finit de la convaincre de changer de vie à l’âge de 43 ans.

 

Ainsi, alors qu’elle triomphe au cinéma, Brigitte décide de se retirer de ce “monde merveilleux et abominable” en 1973 pour mener une vie engagée, entièrement tournée vers la défense de la cause animale.

 

© Miroslav Brozek /Fondation Brigitte Bardot

 

En 1977, elle part aux côtés de l’écologiste suisse Franz Weber sur la banquise défendre les bébés phoques, chassés pour leur fourrure. Malgré une hostilité sur place de la part des trappeurs comme des canadiens, elle profite d’un moment d’accalmie pour se rendre sur une zone de chasse et prendre un bébé phoque dans ses bras. Le cliché pris par le photographe Miroslav Brozek ne tarde pas à faire le tour du monde et à susciter l’émoi international. BB dit alors définitivement au revoir au cinéma.

 

La principale intéressée ne devrait pas visionner cette série sur sa propre histoire. Elle a ainsi déclaré en décembre dernier au Journal du dimanche : “Je m’en moque : la seule chose qui importe, c’est ma vraie vie avec moi dedans. Et pas des biopics à la con”. 

 

Pour autant, elle a bien donné son accord et a approuvé le choix de la réalisatrice.

 

Décidément, c’est peut-être ça le secret Brigitte Bardot : une franchise à toute épreuve !

 

Bardot

Une série réalisée par Danièle et Christopher Thompson pour France Télévision (2023)
Avec Julia de Nunez, Victor Belmondo, Hippolyte Girardot, Géraldine Pailhas, Yvan Attal, Anne le Ny, Noham Edje
Diffusé sur France 2 depuis le 8 mai et en replay sur la plateforme France.TV

 

 

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Photo à la Une : © France Télévision/Federation Studios


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