L’attaque “Deluge D’Al Aqsa”, déclenchée par le Hamas au petit matin du 7 octobre à la surprise générale, met fin à la période de trêve débutée en mai en Israël. L’attaque, d’une envergure sans précédent, ravive le traumatisme de la guerre du Kippour de 1973. Elle met en lumière les défaillances des services de renseignement israéliens qui semblent n’avoir rien vu venir alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahou, avait promis la sécurité en échange d’un régime autocratique.
« Ce qui s’est passé est sans précédent en Israël ». Tels sont les mots du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, commentant l’offensive du Hamas contre Israël aux première lueurs du samedi 7 octobre 2023. Après une intense salve de roquettes lancées en direction d’Israël, les combattants du Hamas ont utilisé des véhicules, des bateaux et même des parapentes motorisés, pour contourner la barrière massive entourant Gaza. Ils ont ainsi attaqué des positions militaires et des civils en plein milieu des rues, samedi dernier.
En outre, Israël a fait face à une attaque à sa frontière nord, près du Liban. Le Hezbollah libanais, qui est un allié du Hamas et de l’Iran, a tiré des obus sur une zone contestée à la frontière, provoquant une riposte par un drone israélien contre une cible du Hezbollah dans le sud du Liban.
Les combats ont fait « plus de 600 morts » et « plus de 2000 blessés », dont 22 graves, côté israélien, selon le gouvernement. Dans la bande de Gaza, 370 Palestiniens ont été tués et près de 2000 blessés selon le Hamas. Pour Israël, cette escalade est la plus meurtrière dans le conflit israélo-palestinien depuis des décennies.
L’attaque du Hamas a été condamnée par les pays occidentaux, et le président américain Joe Biden a réaffirmé son « soutien inébranlable » à Israël. Le Conseil de sécurité de l’ONU a tenu une réunion d’urgence dimanche pour discuter de la situation. Le pape François a appelé à la cessation des attaques en Israël, soulignant que « le terrorisme et la guerre ne mènent à aucune solution ».
Négociations entre Israël et l’Arabie saoudite
Cette offensive a été lancée alors que les négociations entre Israël et l’Arabie saoudite, sous la médiation des États-Unis, semblaient prendre de l’ampleur en vue d’une normalisation. Une démarche vivement critiquée par le Hamas et son allié iranien.
Après la rencontre entre le président américain Joe Biden et le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou à New York le 20 septembre, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman (MBS) avait manifesté son appui aux pourparlers de l’administration Biden. « Nous espérons que [les négociations] aboutiront à un accord qui facilitera la vie des Palestiniens et permettra à Israël de jouer un rôle au Moyen-Orient », a-t-il déclaré.
MBS exige plusieurs concessions de la part des États-Unis, notamment un pacte de défense entre l’Arabie saoudite et Oncle Sam, avec à la clef pour son pays des armes sophistiquées et le soutien d’un programme nucléaire civil. Celles-ci se heurtent encore à la résistance du Congrès américain. Il a appelé à une coopération plus étroite en matière de sécurité et d’économie, la jugeant cruciale pour les États-Unis comme pour l’Arabie saoudite, pour la sécurité au Moyen-Orient et dans le monde.
À la suite des attaques du 7 octobre 2023, l’Arabie saoudite a appelé à la désescalade militaire. « L’Arabie saoudite appelle à l’arrêt immédiat de l’escalade entre les deux parties, à la protection des civils et à la retenue. (…) L’Arabie saoudite renouvelle son appel à la communauté internationale pour qu’elle assume ses responsabilités et mette en place un processus de paix crédible qui conduise à une solution à deux États, de manière à assurer la sécurité et la paix dans la région et à protéger les civils », a indiqué le ministère saoudien des affaires étrangères dans un communiqué samedi après-midi.
Toutefois, le royaume a déclaré son soutien au Hamas, l’organisation au pouvoir dans la bande de Gaza. Une position pour le moins ambigüe.
Comportements ambigus
Un soutien au Hamas que l’on retrouve au Qatar et en Iran et qui pourrait mener à une reconstitution de la Ligue Arabe contre Israël, plongeant la région dans un climat plus qu’incertain.
« Le ministère des affaires étrangères tient Israël pour seul responsable de l’escalade actuelle en raison des violations constantes des droits du peuple palestinien, la dernière en date étant les raids répétés sur la mosquée bénie d’Al Aqsa sous la protection de la police israélienne », indique le gouvernement qatari dans un communiqué.
L’allusion aux « raids répétés » contre Al Aqsa, fait référence aux ascensions quotidiennes légales de visiteurs juifs sur le Mont du Temple, où se situe Al Aqsa. Le Mont du Temple est un lieu d’une importance capitale pour la foi juive, abritant les vestiges des deux Temples saints juifs détruits par le passé au cours de batailles historiques. En parallèle, Israël collabore depuis un certain temps avec le Qatar pour acheminer des subventions en espèces mensuelles aux habitants démunis de Gaza. Cette population a vu ses moyens de subsistance anéantis par le gouvernement du Hamas, qui a orienté la majeure partie de ses ressources financières et de son développement vers les efforts de sa propre armée, visant à éradiquer l’État juif.
De son côté, l’Iran est allé plus loin en soutenant pleinement son mandataire, le Hamas, dans ses efforts pour anéantir l’État juif. « Nous félicitons les combattants palestiniens. Nous soutiendrons les combattants palestiniens jusqu’à la libération de la Palestine et de Jérusalem ».
Depuis des années, l’Iran soutient, équipe et forme généreusement le Hamas et son allié basé à Gaza, le Jihad islamique palestinien, ainsi que son mandataire au Liban, le Hezbollah, dans leurs efforts pour attaquer Israël.
L’espoir du tourisme mis à mal
Lors d’une visite historique en Arabie saoudite fin septembre, le ministre israélien du tourisme, Haim Katz, a déclaré que c’est l’industrie du voyage qui peut dégeler les relations glaciales entre les deux pays. « Le tourisme est un pont entre les nations », a déclaré M. Katz. « La coopération dans le domaine du tourisme a le potentiel de nous rapprocher les uns des autres et d’annoncer une prospérité économique. »
En considérant les résultats du tourisme israélien dans d’autres États du Golfe, il pourrait sembler optimiste, voire naïf, de penser que les voyages entre l’Arabie saoudite et Israël connaîtront un essor significatif. Les Émirats arabes unis ont normalisé leurs relations avec Israël en 2020 grâce aux accords d’Abraham signés aux États-Unis. À l’époque, on avait l’espoir que cette signature stimulerait à la fois les échanges commerciaux et le tourisme. Toutefois, en réalité, le nombre de touristes en provenance du Golfe se rendant en Israël a été pratiquement insignifiant.
L’année dernière, plus d’un demi-million d’Israéliens ont voyagé à Dubaï et à Abou Dhabi, mais seulement 1 600 citoyens émiratis ont visité Israël depuis la levée des restrictions de voyage en 2022, selon le ministère israélien du tourisme, cité par l’Associated Press au début de l’année.
Géographie du luxe remaniée
Sous la pression des tensions géopolitiques, la géographie du luxe est logiquement remise en question dans la région. Une étude publiée par le Boston Consulting Group (BCG) en partenariat avec Altagamma, établissait en juillet que le marché du luxe au Moyen-Orient, estimé à près de 15 milliards d’euros en 2023, devrait doubler d’ici 2030 pour atteindre 30 à 35 milliards d’euros, sous l’impulsion des Émirats arabes unis et surtout de l’Arabie saoudite.
D’autres études semblent confirmer ces prévisions. McKinsey & Company, dans son dernier rapport sur le secteur, estime que le Moyen-Orient est, avec l’Amérique du Nord, le marché ayant le plus fort potentiel de croissance en 2023.
En d’autres termes, l’Arabie saoudite est un marché lucratif pour les marques de luxe occidentales. Nombre d’entre elles, à la recherche de nouveaux débouchés pour réduire leur dépendance à l’égard de pays comme la Chine, ont pris des mesures pour s’implanter dans la région, comme Kering, Richemont ou encore Jacob and Co.
Cela ne fait aucun doute, la situation sera observée de près par ces marques de luxe. Et si l’escalade ne faiblit pas, elles devront revoir leur stratégie de développement dans la région.
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