Après le succès rencontré par l’exposition 50 Seas en 2018, Christie’s France renouvelle sa Carte Blanche à Mathieu Lehanneur. Le designer, à la renommée internationale et à l’origine d’objets aussi emblématiques que symboliques de Paris 2024 comme la flamme et la vasque olympique, présente en avant-première l’exposition Ici et maintenant, du 17 au 23 janvier, au sein de la Maison aux enchères.
Épris de nature, de surfaces aqueuses et de réflexions sur l’unicité du monde, Mathieu Lehanneur dévoile sa dernière exposition, présentée au sein du siège parisien de la Maison de vente aux enchères Christie’s.
Intitulée Ici et Maintenant, l’exposition permet au designer français, interviewé dans le LUXUS MAGAZINE N°9 (automne-hiver 2024-25), de renouer avec ses leitmotivs personnels, de l’importance de la nature à celles du temps présent (Carpe Diem) et de la transmission.
L’exposition met notamment en scène, I am, un projet proposant de revisiter la chaise, objet aussi banal qu’utilitaire, mais sous l’angle de la singularité.
Monogramme moderne
Et si la distinction de demain allait plus loin qu’une tenue dans la rue et gagnait le refuge moderne qu’est l’habitat ?
Après avoir modélisé en 3D la démographie de chaque pays dans son œuvre State of The World (état du monde) et inventorié les multiples nuances des immensités bleues, avec 50 Seas, le designer s’intéresse à nouveau au principe d’unicité.
La volonté de se démarquer et de sortir des sentiers battus n’a jamais été aussi forte chez les contemporains d’aujourd’hui. Et c’est en prenant conscience de l’importance de l’identité de chacun que Mathieu Lehanneur a imaginé une série de chaises exclusives dépassant leur seule visée utilitaire et esthétique.
Plus qu’un objet design, la chaise I am devient un blason individuel, une sorte de prolongation de la chevalière observable en joaillerie, réhabilitée ces dernières années par les jeunes générations.
« Nos initiales sont comme notre ADN, à la fois notre code généalogique et symbolique. J’ai voulu faire de chacun de nous un emblème. I am est l’emblème de ce que nous sommes et sera le signe et le souvenir de ce que nous avons été. » a déclaré Mathieu Lehanneur, designer et créateur de sa marque éponyme
Autant monogramme moderne que “logo personnel individualisé et intemporel, incarnant l’existence et l’identité de chacun”, I am remplace également le savoir livresque représenté par la bibliothèque ou l’insolite de l’objet de curiosité.
Moins narcissique qu’il n’en a l’air, le projet s’apparente à une déclaration d’amour à douze figures inspirantes qui peuplent le panthéon intime créatif du designer.
On connaissait Mathieu Lehanneur, fan enfant des prodiges sportifs de l’athlète olympique Carl Lewis (voir LUXUS MAGAZINE N°9), on découvre ses autres figures tutélaires, de l’architecte Richard Buckminster Fuller au musicien récemment disparu et maître du groove, Quincy Jones… Chaque chaise voit ainsi les initiales d’un artiste se fondre dans l’assise et le dossier. Véritable signature décorative, elles épousent par leur police, leur forme, leur matière, l’identité et l’univers de chaque personnalité célébrée.
Cette collection I am préfigure une offre de personnalisation de chaises à destination des particuliers. Manufacturée à la demande, chaque pièce est réalisée exclusivement pour son futur propriétaire. L’emblème est d’abord dessiné à partir de deux ou plusieurs initiales puis façonné en aluminium. La chaise I am peut ensuite bénéficier d’une finition nickelée ou cuivrée.
« Ils sont ma famille de cœur et d’esprit, mon Panthéon intime. Leur exigence, leur talent ou leur humilité me nourrissent. Chacun, par leurs œuvres, leur personnalité ou leurs découvertes, participe à ma vie sans même le savoir. Leur existence est utile à la mienne…» a précisé Mathieu Lehanneur.
Fugit irreparabile tempus
Au delà de la distinction sociale, Mathieu Lehanneur invite le visiteur à s’interroger sur ce temps impalpable qui file et que le poète Virgile célébrait dans ses Géorgiques : « Sed fugit interea, fugit irreparabile tempus, singula dum capti circumvectamur amore », ce qui signifie : « Mais en attendant, il fuit : le temps fuit sans retour, tandis que nous errons, prisonniers de notre amour du détail. »
Un temps pour soi qui diffère de celui pour les autres qui se retrouve aujourd’hui dilaté, asynchrone, fractionné, voire fantasmé, en tous cas qui nous échappe et que chacun rêve de pouvoir optimiser suivant propres ses besoins.
Or, pour reprendre le contrôle sur l’impermanence du monde, rien de tel que de se reconnecter avec son moi profond et la nature originelle. Fidèle à ses sujets de prédilection, Mathieu Lehanneur expose ici de nouvelles créations empreintes d’eau, de ciel radieux et de fleurs délicates.
Wallflower propose une sorte de rencontre entre la nouvelle fantastique de Marcel Aymé, Le passe-muraille, et l’hanami japonais (période des cerisiers en fleurs). C’est ainsi qu’une tornade de fleurs incrustée dans un mur immaculé montre toutes les perspectives de la modélisation 3D.
De son côté, Paradise montre un cabinet en chêne sculpté, comme s’il rejouait à sa manière le mythe grec de Philémon et Baucis, les vieux sages pétrifiés et transformés respectivement en chêne et en tilleul pour veiller à leur demande sur le sanctuaire de Zeus.
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Photo à la Une : portrait de Mathieu Lehanneur ©Leandro Viana/Lehanneur Studio et chaise I am ©Felipe Ribon/Lehanneur Studio