Tempête au Domaine de Rochevilaine : une expérience puissante dans un cocon voluptueux

Le Domaine de Rochevilaine est un phare pour les Relais & Châteaux. Une vue mer omniprésente, une gastronomie de haut niveau, un « spa marin » multi récompensé : c’est l’adresse idéale pour se ressourcer en Bretagne.

 

Force 6 à notre arrivée en plein hiver au Domaine de Rochevilaine dans le Morbihan. Le tonnerre gronde, le vent souffle en rafales, les vagues heurtent violemment les roches noires. On se sent délicieusement protégé entre les murs de vieilles pierres de ce hameau de renom, fleuron des Relais & Châteaux en Bretagne. 

 

Au petit matin, la tempête a disparu et le bruit assourdissant de la mer nous manque. C’était magique ! Rien d’étonnant à ce que ce luxueux domaine hôtelier composé de 34 chambres (dont cinq suites et les trois manoirs privatifs), avec vue sur la mer, affiche complet en hiver. Rochevilaine a ses clients fidèles grisés par l’expérience puissante d’une nature qui se déchaîne alors qu’ils sont installés dans un voluptueux cocon. 

 

Juché sur la pointe de Pen Lan, à vingt minutes de Vannes, le Domaine de Rochevilaine bénéficie d’un panorama exceptionnel. C’est une presqu’île rocheuse d’1,5 hectare dans la commune de Billiers qui tient son nom de sa position entre l’estuaire de la Vilaine et l’Océan. Au bout du monde, hors du temps, il est le lieu idéal pour faire une pause, contempler le paysage, rêver, méditer, créer…

 

Rochevilaine fait des jaloux parmi les palaces de l’Hexagone, car il dispose de 300 mètres de façade maritime privée donnant directement sur l’Océan Atlantique. Nul chemin ou route entre les fenêtres ou la terrasse de votre chambre et la mer. Qui dit mieux ? 

 

Des manoirs aux vieilles pierres de granit burinées par les embruns dans les jardins de curé fleuris, romantiques … et cuisiniers ©Corine Moriou

 

Par le portail de la Vérité (un monumental porche du XIIIème siècle), on découvre un hameau de demeures historiées au milieu d’arbres majestueux, de palmiers, de fougères géantes, de cactus et de parterres de roses et d’hortensias. Toutes les maisons ne sont pas de la même époque, mais l’ensemble insolite, à nul autre pareil, a du panache et un charme fou. Il fallait oser ! 

 

Pierre après pierre, le Domaine de Rochevilaine est né

 

Un peu d’histoire. Il y a soixante-dix ans, cette pointe de landes blessée par la guerre était quasi vierge, sans végétation, bref assez sinistre. 

 

Henri Dresch, un industriel Alsacien fondateur de la marque emblématique « les motos Dresch », est amoureux de la Bretagne. Au début des années 50, il fait l’acquisition du gros rocher de Pen Lan avec son ancien corps de garde et la maison carrée. Mais aux alentours, c’est un grand terrain vide. 

 

Visionnaire, il guette partout en Bretagne des édifices en ruine pour les racheter. Il les fait démonter, tailler, sculpter, remonter pierre après pierre sur la pointe de ce bout de terre. « Une pratique qui ressemble à celle des Américains qui ont acheté des châteaux en France et les ont reconstruits chez eux. Ce ne serait plus possible aujourd’hui avec la loi littoral », note Cécile Nouail Jaquet, l’actuelle directrice de Rochevilaine. 

 

Le Manoir Renaissance dispose de quatre chambres de prestige avec vue sur la mer © DR

 

La réalisation la plus spectaculaire est le Manoir Renaissance entièrement restauré en 1965 avec les pierres du Manoir de Lieuzel à Pleucadeuc.

 

Au sommeil des pierres, Henri Dresch préfère le réveil. A l’oubli, la mise en valeur. A la réplique historique exacte, la mise en scène. Le calvaire, la pierre de Tanit, les bénitiers et fontaines, les lions, les dragons ailés agrémentent les jardins et enveloppent Rochevilaine d’une aura mystérieuse. 

 

Des hôtes prestigieux comme Georges Pompidou, Philippe de Rothschild, Edouard VIII et son épouse Wallis Simpson sont reçus. Des propositions de rachat affluent; le baron Bic qui aime la voile et la Bretagne est débouté de son projet.

 

Une longue maladie emporte Henri Dresch en 1978 et l’établissement connaît alors quelques vicissitudes jusqu’à l’arrivée du Docteur Jean-Pierre Liégeois. Fasciné par l’environnement tellurique et magnétique du lieu, cet adepte du bien-être a la bonne idée de faire construire une balnéothérapie. Les premiers curistes affluent. 

 

Bertrand Jaquet embellit ce patrimoine unique et passe le témoin

 

En 1997, après avoir dirigé un important groupement hôtelier en France et à l’international, Bertrand Jaquet arrive à la barre du navire Rochevilaine. C’est le coup de foudre ! Homme d’affaires, mais surtout homme de passion, il développe, rénove et embellit ce patrimoine hôtelier et gastronomique unique. Rochevilaine devient un phare pour les Relais & Châteaux de France. 

 

Si le Domaine est principalement fréquenté par des Parisiens et une clientèle de l’Ouest de la France, il reste un hôtel élégant qui cultive le beau et le naturel, jamais l’ostentatoire. On n’y vient pas pour voir et être vu, mais pour se ressourcer et admirer une vue à couper le souffle. Rochevilaine incarne des valeurs traditionnelles, un art de vivre marqueur de la civilisation française. 

 

Déjà propriétaire d’une affaire familiale, Bertrand Jaquet a confié à sa femme Michèle et sa fille Marie, la gestion du Grand Hôtel de Solesmes, face à l’abbaye, célèbre pour ses chants grégoriens dans la Sarthe. 

 

« Mon père nous a confié les clés, mais il en garde un double », Cécile Nouail Jaquet et son mari Maxime Nouail, les dirigeants du Domaine de Rochevilaine ©Corine Moriou

 

En 2024, Bertrand Jaquet, 75 ans, cède la direction de ce repère d’exception à sa fille Cécile Nouail Jaquet, 43 ans, et son gendre Maxime Nouail, 40 ans. « Mon père nous a confié les clés, mais il en garde un double, sourit Cécile. Je baigne dans cet environnement depuis mon enfance et mon mari a démarré ici comme commis. Il est aujourd’hui le Chef d’un superbe restaurant gastronomique. » 

 

Une transition familiale qui se déroule en douceur, le patriarche gardant un œil avisé sur les évolutions en cours. L’un des secrets de Rochevilaine est en effet de se remettre en question, d’innover et d’investir entre 300 000 et 500 000 euros par an. 

 

Une nouvelle tranche de vie s’est ouverte pour les maîtres du lieu. En novembre dernier, Cécile et Maxime ont accueilli Marcel, un enfant adopté au Liban … après bien des péripéties administratives. N’en doutons pas : ses parents sauront transmettre à leur fils la passion de Rochevilaine. 

 

Le Spa Aqua Phénicia est l’une pièces maîtresses d’un séjour réussi

 

La pyramide de verre de la grande piscine du spa avec son toit ouvrant © DR

 

De la réception, on voit la grande piscine et des transats face à la mer : un appel irrésistible à la détente. Incontestablement, le spa Aqua Phénicia est l’une des pièces maîtresses d’un séjour réussi. Lors des grandes tempêtes, il est délicieux de s’y réfugier. 

 

En souvenir des Phéniciens qui sont venus à Pen Lan faire le commerce de l’étain, ce spa de 1 300 m2 auréolé de nombreux prix, a été baptisé Aqua Phénicia. Intimiste, doté de soins inédits, il n’a rien à envier aux thalassothérapies des environs. Il est vrai que Bertrand Jaquet a eu une longueur d’avance : en 1997, iI a été le premier hôtelier en France à créer un spa et a déposé le nom de « spa marin »

 

Pour quel massage opter ? Karen prodigue à merveille le soin phénicien sur un lit de pierre chaude recouvert d’un matelas de foin et de plantes. Ce massage dure quarante minutes et se poursuit par une friction avec une essence choisie en fonction du signe zodiacal. C’est le protocole de feu René Noël, un phytothérapeute renommé devenu un proche du Docteur Liégeois. 

 

Entre 11 et 19 heures, le plaisir de la dégustation au Bar à Coquillages dans une ambiance conviviale © Christian Vallée

 

Vous avez une envie soudaine de déguster des huîtres à 4 heures de l’après-midi ? Le Bar à Coquillages, ouvert en 2020, installé juste à côté de la réception, vous tend les bras. On y savoure aussi langoustines, palourdes, bulots, coques, moules, couteaux ainsi que des soupes de poissons et bisques de homard. 

 

Ce concept astucieux répond aux petites faims entre 11 h et 19 heures. Il brise le ventre mou de l’après-midi lorsque l’on ne veut pas quitter le doux cocon de l’hôtel. Aujourd’hui : No sport ! 

 

Autour d’un grand comptoir en fer à cheval, dix personnes peuvent se jucher sur les tabourets. Accessible également à la clientèle extérieure qui apprécie l’esprit bistro, le Bar est propice aux échanges. Un moment de convivialité qui, bien entendu, n’a rien à voir avec les bars de marins de Cherbourg. 

 

Une cuisine créative haut de gamme orchestrée par Maxime Nouail

 

La salle à manger de Rochevilaine ressemble à un bateau et invite à prendre le large © DR

 

Le restaurant gastronomique ressemble à un bateau qui nous oblige à quitter la terre ferme pour prendre le large. Les trois salles en enfilade offrent une vue époustouflante sur le vol des mouettes et des goélands au-dessus d’une mer déchaînée. Au loin, on aperçoit l’île Dumet. Avec cinquante mètres de vitrage panoramique, vous êtes assuré d’avoir une table avec vue sur la mer. 

 

Cécile Nouail, Maîtresse de maison, n’aime rien tant que veiller sur les salles, deviner le désir d’un convive, lancer des commandes au bon moment. Et c’est vrai, le service est d’orfèvre. « Elle est la reine de la découpe du bar en croûte de sel », s’amuse à dire Mickaël Bazin, 45 ans, en charge de l’hôtellerie, un fidèle de Bertrand Jaquet, qui a fait ses classes à Londres.  

 

Maxime Nouail, Maître Cuisinier de France, nous régale d’une cuisine créative et savoureuse avec les grands classiques que l’on aime retrouver à une table gastronomique ©Corine Moriou

 

Maxime Nouail règne sur la cuisine depuis 2014. Il foule rarement le parquet bicentenaire de la salle à manger. Son langage, c’est ce qui arrive dans l’assiette. S’il y a des compliments, c’est sa femme qui les recueille. 

 

Avec sa brigade de 18 personnes, ce Chef de talent nous régale d’une cuisine créative et gourmande avec les grands classiques que l’on aime retrouver à une table gastronomique. « Je propose une cuisine sincère, inventive et chic constituée à 75% de produits locaux de la mer dont des espèces abandonnées que je remets au goût du jour. J’y mets l’amour de mon pays, des fournisseurs locaux, des gens avec lesquels je travaille, de ce lieu merveilleux », détaille le natif de Plumelec. 

 

Formé sous la férule de Patrice Caillaud à Rochevilaine, Maxime a fait une tournée des grandes tables de 2010 à 2012, notamment au Château de la Treyne dans le Lot et chez Christopher Coutanceau (qu’il dit beaucoup apprécier) à La Rochelle, puis il est revenu à Billiers.  

 

Présentation du homard vivant de 1,3 kg dans le salon Saint-André lors de l’apéritif ©Corine Moriou

 

Ce serait une faute de ne pas prendre l’apéritif voluptueusement lovés dans les fauteuils club du salon Saint-André. Vous pourrez alors découvrir un whisky breton comme le Galaad de Ploërmel ou le Naguelann de Languenan, accompagné des subtiles mises en bouche concoctées par Maxime Nouail qui révèlent la finesse de son art culinaire. 

 

Si après avoir lu la carte, vous avez opté pour un homard de casier, celui-ci vous sera présenté vivant. Dégusté en plat principal, il ne pèse pas moins de 1,3 kilos, mais si l’on est seul à le commander, la maison dispose de petites pièces au minimum de 600 grammes ! Avec sa sauce coraillée et ses tagliatelles, c’est un délice. Assurément le meilleur homard jamais savouré. 

 

Vous l’avez compris, la star de Rochevilaine, c’est ce crustacé décapode. Un « Menu Homard » se joue dans les assiettes avec une mise en scène en cinq actes. « De la tête à la queue en passant par les pinces, on utilise tout, la glace aux carapaces de homard étant le point d’orgue », commente le Maître Cuisinier de France dont l’idée a été depuis copiée dans d’autres établissements.   

 

On se régale des ormeaux sauvages au beurre mousseux, jus de porc de la Tellen Du, déclinaison de céleri et sarrasin ou encore des coquilles Saint-Jacques de Quiberon rôties avec carottes et écume de bardes. Sortant du répertoire iodée, le pigeonneau du Mesquer rôti avec sa cuisse en cromesquis, sa déclinaison de betterave et son jus de réglisse émoustille les papilles. Un plat vraiment exquis. 

 

Le plateau de fromages réalisé avec la complicité de petits producteurs morbihannais ©Corine Moriou

 

Le sommelier, Jean-Marc Boitaud, vingt ans de maison, nous fait la surprise de flacons comme le Dantelezh, un Chardonnay 2023 de Marie Devigne et Guillaume Hagnier ou le Morties Jamais Content de Pic Saint Loup 2022. 

 

Avec d’aussi bons conseils, on ne peut résister au plateau de fromages réalisé exclusivement avec la complicité de petits producteurs morbihannais. Une prouesse de plus ! 

 

Jean-Marc Boitaud, l’un des deux sommeliers experts de la maison, devant la porte de son bunker ©Corine Moriou

 

Privilège de fin de soirée : le sommelier nous entraîne visiter les caves de Rochevilaine. Au milieu du jardin, un escalier très raide accède à un ancien blockhaus. Des centaines de grands crus trouvent là les conditions idéales de vieillissement. 

 

Les ormeaux sauvages au beurre mousseux, jus de porc de la Tellen Du, déclinaison de céleri et sarrasin ©Corine Moriou

 

Entouré d’une équipe remarquable aux fourneaux et en salles, Maxime Nouail nous régale d’une cuisine délicate, pleine de personnalité. Franchement, on comprendrait mal que Michelin ne remette pas à Rochevilaine l’étoile perdue en 2021 lors de la période du Covid. Verdict le 31 mars 2025.

 

Les chambres, suites et manoirs de Rochevilaine font voyager autour du monde

 

Chaque chambre a une ambiance unique selon qu’elle se trouve dans le Manoir Renaissance, le Manoir de l’Orient, la Maison du Vicomte, la Closerie des mines ou le Château de granit et de verre. Une prouesse d’inventivité, fruit d’un long travail, année après année, que s’est imposé Bertrand Jaquet.

 

Il ne faut pas hésiter à demander conseil lors de la réservation tant le choix est cornélien.  

 

La chambre de l’Amiral a belle allure avec sa table marine, des hublots sur les portes des placards, une lunette braquée sur le large. On s’imagine sur le Normandie au temps des Transatlantiques. 

 

Les chambres Chandernagor et Pondichéry du Manoir de l’Orient sont aussi disputées par les clients que les comptoirs – dont elles portent le nom –  étaient convoités à l’époque. Les soieries lumineuses, les meubles anciens et les objets de l’Inde mythique embarquent les occupants dans un autre monde. 

 

L’appartement Anita Conti, habillé de photos en noir et blanc, rend hommage à la grande océanographe et photographe. Très prisé des amateurs de design, Le Loft des Artistes avec ses 90 m² à fleur d’eau et ses 10 mètres d’ouverture sur la mer, est un vaste espace où la lumière et la mer sont les éléments majeurs du décor.

 

Rivages dans le Manoir Renaissance rend hommage aux gens du pays et aux marins

 

Notre coup de cœur ? La chambre Rivages dans le Manoir Renaissance. Elle est spacieuse et chaleureuse avec ses alcôves et petits et grands canapés qui incitent à s’isoler pour observer le panorama. Dans la baignoire sabot, on peut prendre son bain tout en regardant la mer. Une immense photo nous rappelle la pêche à pied pratiquée en bottes à marée basse par les gens du pays. En guise de décoration, on trouve d’authentiques pieux d’élevage de moules de bouchot, des casiers pour les homards. La terrasse en bois ressemble au pont d’un bateau : elle invite à se relaxer quand la tempête a disparu. 

 

Des artistes comme Bénabar, Michel Jonasz, Jacques Dutronc, Jean-Louis Aubert, Clovis Cornillac ont jeté l’ancre pour une nuit ou plus au Domaine de Rochevilaine. A quand une chanson dédiée à ce hameau de légende ? 

 

Les jolis vélos rouges, la couleur des motos Dresch, pour sillonner les routes alentours ©Corine Moriou

Ce que l’on a aussi aimé 

 

  • Les petits déjeuners légendaires de Rochevilaine déclinés en quatre menus dont « l’Armor » avec huîtres et flan de poulpe.

 

  • La balade de trente minutes par le sentier des douaniers en passant par la plage des Amoureux, puis le chemin des mégalithes où trône le dolmen du Crapaud.  

 

  • Les vélos rouges, la couleur des motos Dresch, à la disposition de la clientèle pour sillonner la campagne.

 

  • L’excellent livre « Sous les vents de Pen Lan, le Domaine de Rochevilaine » retraçant l’histoire du Domaine jusqu’à aujourd’hui, superbement écrit par François Cuel, en vente sur place.  

 

Et si on y allait ? 

 

Domaine de Rochevilaine 

Pointe de Pen Lan 

56 190 Billiers 

Tél : +33 (0)2 97 41 61 61 

Le site Web : www.domainederochevilaine.com 

 

Chambre à partir de 264 euros en early booking

Suite à partir de 532 euros en early booking

 

Au restaurant, la carte ou différents menus :

Menu de marché en trois plats servi au déjeuner (sauf les dimanches et jours fériés) : 46 euros 

Menu de saison en trois plats : 88 euros 

Menu Confiance avec sept plats : 123 euros 

Menu Homard en cinq services : 123 euros 

 

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Photo à la Une : Après la tempête, le beau temps au Domaine de Rochevilaine à Billiers, dans le Morbihan © DR

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