Le 6 juillet, Massoud Pezeshkian a été élu président de l’Iran, marquant une victoire pour le camp réformiste face à l’ultraconservateur Saïd Jalili. Cette élection intervient dans un contexte de mécontentement populaire et de crises économiques. De son côté, la communauté internationale observe avec attention, espérant des changements dans les relations de l’Iran avec l’Occident.
Le réformateur Massoud Pezeshkian a été élu président de l’Iran au second tour de l’élection présidentielle, selon les résultats officiels annoncés le samedi 6 juillet par le ministère de l’Intérieur.
Le député de la ville iranienne de Tabriz a obtenu plus de 16 millions de voix contre 13 millions pour son adversaire, l’ultraconservateur Saïd Jalili, sur un total de 30 millions de votes dépouillés. Le taux de participation s’est établi à 49,8 %, indiquant une participation modérée des électeurs.
La présidentielle a été organisée rapidement après le décès du président ultraconservateur Ebrahim Raïssi dans un accident d’hélicoptère le 19 mai. Ce scrutin se déroule dans un contexte de mécontentement populaire, en grande partie dû à une économie frappée par des sanctions internationales.
Lors de sa première déclaration après l’annonce de sa victoire, Massoud Pezeshkian a tendu « la main de l’amitié à tout le monde » et a souligné l’importance de la collaboration pour le progrès du pays.
« Nous tendrons la main de l’amitié à tout le monde, nous sommes tous des habitants de ce pays, nous devrions utiliser tout le monde pour le progrès du pays », a-t-il déclaré.
L’élection a été suivie avec une grande attention à l’étranger en raison des crises géopolitiques impliquant l’Iran, notamment la guerre à Gaza et le dossier nucléaire. L’Iran, un acteur clé au Moyen-Orient, s’oppose fréquemment aux pays occidentaux, en particulier aux États-Unis, son ennemi juré.
Souffle de changement
Massoud Pezeshkian, âgé de 69 ans, a reçu le soutien des anciens présidents Mohammad Khatami et Hassan Rohani. Son adversaire, Saïd Jalili, 58 ans, a bénéficié de l’appui de Mohammad-Bagher Ghalibaf, le président conservateur du Parlement. Certains opposants, tant en Iran qu’au sein de la diaspora, ont appelé au boycott du scrutin, affirmant que les réformateurs et les conservateurs ne représentent que deux faces de la même médaille.
Lors des débats télévisés, les candidats ont discuté des défis économiques, des relations internationales, de la faible participation électorale et des restrictions sur Internet. Massoud Pezeshkian a plaidé pour des « relations constructives » avec Washington et les pays européens pour sortir l’Iran de son isolement. De son côté, Saïd Jalili, opposé à l’accord nucléaire de 2015, est connu pour ses positions fermes contre les puissances occidentales.
Après les résultats des élections, le président russe Vladimir Poutine a félicité le nouveau président, espérant que cette élection renforce la coopération bilatérale.
Le roi Salman d’Arabie Saoudite a exprimé ses « sincères félicitations », tandis que le Premier ministre indien Narendra Modi a manifesté son désir de travailler étroitement avec Massoud Pezeshkian « pour renforcer davantage nos chaleureuses et anciennes relations bilatérales dans l’intérêt de nos peuples et de la région », a-t-il écrit sur Twitter
Pouvoir limité
Malgré sa victoire, les pouvoirs de Massoud Pezeshkian resteront limités, les grandes lignes politiques et diplomatiques étant définies depuis 35 ans par le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei. La présidence en Iran est avant tout exécutive, appliquant les directives établies par le chef de l’État.
Massoud Pezeshkian devra également composer avec un Parlement à majorité ultraconservatrice, qui vote les lois et doit approuver la composition du gouvernement.
Le nouveau président entame ainsi son mandat dans un climat complexe, avec des attentes élevées de la part de ses partisans et des défis majeurs à relever sur la scène nationale et internationale.
Reconstruire l’économie
Depuis 1979, l’économie de la République islamique d’Iran s’est développée en parallèle avec les sanctions. Bien que ces dernières n’aient pas réussi à transformer le régime, elles ont empêché la formation d’une classe moyenne, freiné la croissance économique et renforcé les élites politiques, qui, dans un État autoritaire, sont les mieux placées pour les contourner.
L’élection de Massoud Pezeshkian pourrait changer la donne. Premier réformiste à accéder à la présidence de l’Iran depuis 2005 – Hassan Rohani, au pouvoir de 2013 à 2021, était plutôt considéré comme un modéré – Massoud Pezeshkian devra diriger le pays afin de trouver un équilibre entre la nécessité de lever les sanctions pour attirer les investissements et la volonté de maintenir une certaine indépendance économique.
Après l’allègement des sanctions économiques en 2016, l’Iran avait en effet entamé une moisson de contrats, notamment pour les groupes français. Lors de la visite de Hassan Rohani en France la même année (la première d’un président iranien en dix-sept ans), 15 milliards d’euros d’accords commerciaux avaient été signés dont un contrat colossal avec Airbus portant sur l’acquisition de 118 avions.
Cependant, en 2018, l’élection de Donald Trump avait rétabli un embargo sévère, entrainant une fuite sans précédent des investissements directs étrangers et des ambitions déçues, notamment de la part des marques de luxe et beauté. En 2014, avec ses 80 millions d’habitants, l’Iran était le deuxième marché des cosmétiques au Moyen-Orient, derrière l’Arabie saoudite, avec des ventes dépassant les 3,5 milliards d’euros, selon les données d’Euromonitor.
Alors que l’Iran appréhende le mandat de Massoud Pezeshkian avec espoir, la politique énergétique iranienne sera cruciale pour l’avenir économique du pays. Avec certaines des plus importantes réserves pétrolières au monde, les décisions prises à Téhéran auront des répercussions mondiales.
Les investisseurs et les analystes suivront de près l’évolution de la situation, car celle-ci influencera non seulement l’économie iranienne, mais aussi la dynamique du marché pétrolier international.
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Photo à la Une : © Sipa/Pacific Press/Sobhan Farajvan