Elle a été la voix de L’Impératrice pendant plus de neuf ans aux côtés de cinq musiciens. En septembre dernier, Flore Benguigui a surpris la scène musicale en annonçant quitter le groupe pop et nu-disco français en pleine promotion du troisième opus, Pulsar . Pourquoi ? La chanteuse accuse les autres membres de pression et d’humiliation et dénonce le sexisme dans cette industrie artistique.
Flore Benguigui a été la tête d’affiche du groupe L’Impératrice pendant près d’une décennie. Neuf ans à écumer les salles de concert et les festivals (notamment celui de Coachella qui a accru leur notoriété aux Etats-Unis), porté par des musiques pop électro et des singles phares comme Me Da Igual, Vanille Fraise, Agitations Tropicales et Sonate Pacifique. L’Impératrice a fait danser et a ému ses fans, très présents à l’étranger, à travers ses Eps et ses trois albums : Matahari, Tako Tsubo et le dernier Pulsar, sorti en juin 2024.
Pourtant, la success story du groupe n’a pas été aussi idyllique en interne. Le groupe aux trois millions d’écoutes par mois sur Spotify a perdu sa chanteuse depuis septembre dernier, remplacée par l’artiste Louve. Flore Benguigui a depuis expliqué les raisons de son départ.
Un départ sur fond de mauvais comportements
Dans un message Instagram, Flore Benguigui avait annoncé son départ du groupe qui s’apprêtait à se lancer dans une tournée internationale pour leur dernier album Pulsar. Elle indiquait alors qu’il lui était « physiquement et psychologiquement impossible de tenir la suite » et qu’elle souhaitait protéger sa « santé physique et mentale qui a été très mise à mal ces dernières années ». Si elle n’avait alors pas donné plus de détails, Flore Benguigui remettait tout de même en question une industrie musicale « toxique et injuste envers les femmes, envers les victimes, envers la santé mentale, envers celleux qu’elle juge « trop fragiles pour ce métier » ». Elle rendait cependant hommage à L’Impératrice et se disait très fière du chemin parcouru toutes et tous ensemble.
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Mais l’ampleur du mal-être semblait plus profond. Il y a quelques semaines, la chanteuse s’est confiée à Médiapart. Outre le sexisme ordinaire dans l’industrie musicale, elle y dénonce des violences psychologiques, des humiliations et diverses pressions subies aux côtés des cinq musiciens qui forment le groupe. Parmi eux, on compte Charles Dugros de Boisseguin (claviers), Hagni Gwon (claviers), David Gaugué (guitare basse), Achille Trocellier (guitare électrique) et Tom Daveau (batterie).
« On m’a toujours répété que j’étais une mauvaise chanteuse, que je chantais faux, pas assez fort » décrit l’artiste, qui indique que les performances vocales passaient toujours en dernier au sein de L’Impératrice. « J’ai perdu toute confiance en moi dans tous les domaines qui sont censés faire partie de mon métier ».
« Sous emprise »
« Ils pouvaient me hurler dessus devant les autres membres du groupe (…) Une fois, un des membres du groupe s’est montré physiquement menaçant envers moi et ça a failli aller assez loin » raconte la chanteuse. Flore Benguigui qui réussit à mettre des mots sur son état, se disant « complètement sous emprise » et baladée entre des démonstrations d’amour et de cadeaux et les comportements déplacés et rabaissants.
« J’en suis arrivée à un point où je me disais que je ne méritais pas d’être là, que je ne méritais pas le succès de L’Impératrice, de faire toutes ces tournées dans le monde entier et qu’à l’inverse, je méritais d’être traitée comme ça. Je méritais d’être traitée comme ça, qu’on me rabaisse. Pour moi, c’était normal d’être maltraitée, malheureuse. […] On m’a déjà demandé d’effacer des choses sur mes réseaux sociaux. Même mes prises de parole sur scène étaient très contrôlées ».
« J’étais en dépression, sous anxiolytiques et j’essayais de sauver la face parce que je ne voulais pas que ça se sache » poursuit l’artiste et compositrice, indiquant que le groupe ne s’est pas remis en question face à ces agissements même si certains textes écrits par Flore étaient on ne peut plus explicites. A tel point que l’ex-chanteuse de L’Impératrice a perdu sa voix pendant un an et demi, se cachant derrière des voix enregistrées pour assurer les concerts. « Si je ne partais pas avant la fin de l’été, je ne sais pas comment j’aurais pu survivre » conclut-elle.
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Face à ces propos, les membres du groupe se sont défendus en indiquant que « les situations décrites par Flore ne correspondent pas à la réalité des faits ». « Si l’investissement et l’attention que nous lui avons apportés n’ont pas suffi, nous ne pouvons que le regretter ». Les cinq musiciens se sont tout de même dits « tristes de cette situation » et conscients de « ce que le groupe lui doit ». Le groupe n’a pour autant pas stoppé ses concerts et est actuellement en pleine tournée en France et à l’international jusqu’à l’été 2025.
Désormais seule à bord de son propre navire, Flore Benguigui souhaite continuer à écrire et chanter des chansons « en ayant toujours le choix de faire des projets » qui lui tiennent à cœur, décrivait-elle sur Instagram. Son témoignage est perçu comme précieux, pour de nombreuses femmes dans la musique et particulièrement dans des groupes numériquement dominés par des hommes. Des révélations qui pourraient encourager d’autres chanteuses à parler et, plus largement, faire avancer le bien-être général des femmes dans le secteur musical.
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Photo à la Une : © Youtube – L’Impératrice Anomalie bleue
