Ce 12 novembre, la ville de Hong Kong inaugure le M+, un musée d’art contemporain qui ambitionne de mettre la ville sur la carte culturelle mondiale. Cette ouverture se fait dans un contexte politique tendu avec Pékin, qui impose de plus en plus sa loi sur la sécurité nationale sur l’ex-colonie britannique.
Le M+ représente un projet à plusieurs milliards de dollars. Il est le symbole de l’ambition de Hong Kong dans le domaine de l’art contemporain, ainsi que sa volonté de rivaliser avec des musées comme la Tate Modern de Londres, le MoMA de New York ou encore le Centre Pompidou de Paris. Des œuvres d’art contemporain d’artistes chinois, asiatiques et même occidentaux y seront exposées.
The wait is over. The countdown has finished. Today, we welcome you to M+, Asia’s first global museum of contemporary visual culture.
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Photos by Kevin Mak.
© Kevin Mak Courtesy of @HerzogdeMeuron pic.twitter.com/F2b3Ms1K5Q— M+ (@mplusmuseum) November 12, 2021
L’ouverture du M+ revêt également une forte dimension politique. Depuis les manifestations de 2019, la Chine impose en effet ses règles à Hong Kong. La loi sur la sécurité nationale a ainsi permis l’arrestation de nombreux militants démocratiques et d’opposants au régime de Pékin. Une loi qui fait aussi planer son ombre sur l’expression artistique, au combien politique. Conservateurs et artistes luttent d’ores et déjà contre ce qui s’apparente à une censure politique.
Plus tôt dans l’année, des politiciens et des médias pro-Pékin ont lancé une campagne de dénigrement et de critiques envers certaines œuvres. Une photographie de l’artiste chinois Ai Weiwei représentant un doigt d’honneur sur la place Tiananmen de Pékin, a notamment été accusée d’enfreindre la loi sur la sécurité nationale et d’inciter à la ‘’haine’’ contre la Chine.
« L’ouverture du M+ ne signifie pas que l’expression artistique doit se placer au-dessus des lois » , a déclaré à la presse et lors de l’inauguration Henry Tang, directeur du district culturel de West Kowloon, le nouveau pôle culture qui inclut le M+.
Tang a également souligné que toutes les expositions doivent « être conformes » à la loi sur la sécurité nationale et que certaines œuvres ne seraient pas exposées. « Je n’ai aucun doute sur le fait que le MoMA de New York ait probablement dans ses archives des œuvres d’art qui ne seraient pas exposées aujourd’hui parce que ça ne serait pas politiquement acceptable dans l’environnement actuel » , s’est-il défendu.
Cet épisode marque le déclin de la scène artistique de Hong Kong, jadis effervescente. La répression intense des militants démocratiques et de la société civile a contraint de nombreux artistes à s’exiler. Kacey Wong est l’un d’eux, et vit désormais à Taïwan, pour y exercer son art, même si deux de ses œuvres seront exposées au M+. Selon lui, il existe une forme d’autocensure artistique qui se renforcerait depuis plusieurs années. La loi sur la sécurité nationale n’est qu’une étape supplémentaire pour Pékin dans sa mise au pas de Hong Kong.
« Le musée est clairement sous censure » , a commenté Ai Weiwei depuis Cambridge où il est maintenant basé. « Lorsque vous avez un musée qui ne peut pas ou est incapable de défendre sa propre intégrité en matière de liberté d’expression, cela soulève une question. Le musée ne peut pas bien fonctionner en termes de culture contemporaine » .
« Un musée peut être, bien sûr, une plate-forme de célébration pour les arts » , a déclaré Wong depuis Taïwan. « Mais cela peut aussi être un outil pour les autorités pour enterrer l’art pour toujours » .
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Photo à la Une : © Ideat