De nouveau propulsée par la série Netflix, l’histoire d’Erik et Lyle Menendez a déchainé les passions dans les années 80. Condamnés à la perpétuité en 1996 pour l’assassinat de leurs parents, les deux frères sont de retour au tribunal pour prétendre à une potentielle libération.
A la fin août 1989, Lyle, âgé de 21 ans, et Erik, âgé de 18 ans, assassinent violement leurs parents dans leur villa de Beverly Hills. L’homme d’affaires millionnaire José Menendez et sa femme Mary Louise « Kitty » sont criblés de balles. Appelés par la fratrie en pleurs qui n’avoue alors rien, les policiers font face à un véritable bain de sang. La piste du crime organisé est privilégiée, soutenue par les deux frères qui dépensent depuis leur argent dans de grandes fêtes et des articles de luxe ostentatoires. Mais plusieurs mois après, l’enquête prend une nouvelle tournure quand des enregistrements d’aveux révélés à leur psychothérapeute arrivent aux mains de la police. L’histoire déchaîne alors les foules et divise le grand public.
L’argent ou l’abus ?
Si les frères Menendez nient d’abord les faits, les cassettes audios sont accablantes. Lyle et Erik sont accusés d’avoir assassiné leurs parents. La peine de mort est envisagée. Tout le procès est diffusé à la télévision. Une première qui contribue à l’effervescence de cette histoire.
Selon l’accusation, les jeunes hommes auraient tué José et Kitty pour toucher leur immense fortune. Mais Erik et Lyle, respectivement défendus par les avocates Leslie Abramson et Jill Lansing, mentionnent une tout autre version.
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Les deux frères justifient ce double meurtre par de nombreux abus physiques subis depuis l’âge de six ans par leur père dépeint comme un cruel pédophile, narcissique et dominant. Entre les agressions sexuelles, les viols à répétition et la violence psychologique, les détails sont terrifiants. Le portrait de leur mère est aussi accablant. La matriarche sévère, instable et dépendante à l’alcool et à la drogue aurait eu connaissance de ces abus mais n’aurait rien fait pour protéger ses enfants. Ces derniers seraient passés à l’acte lorsque le père les aurait menacés de mort s’ils dévoilaient ce secret de famille.
Alors que les témoignages se succèdent, dont de nombreux (et même la propre famille Menendez) confirment l’image de parents durs et violents vis-à-vis de leurs enfants, le jury est pour autant polarisé. Les femmes font davantage preuve de compassion et privilégient l’homicide volontaire avec circonstances atténuantes, la légitime défense ne tenant pas la route puisque les enfants n’étaient pas en danger immédiat. Mais les hommes, quant à eux, ne croient pas à cette histoire et penchent pour l’assassinat sur fond financier. D’autant plus que les procureurs les décrivent comme une fratrie cupide et capricieuse, née avec une cuillère d’argent dans la bouche, motivée par la fortune acquise par leur père.
Après des mois de délibérations, le jury n’arrive toujours pas à s’entendre et le procès est annulé.
Un deuxième procès beaucoup plus rapide
Deux ans plus tard, en 1995, un deuxième procès s’ouvre, cette fois-ci sans caméra. Le grand public s’est détourné de l’affaire, préférant suivre celle de la star du football O.J. Simpson.
Menendez brothers to appear in court for first time in 28 years —and possibly soon walk free https://t.co/iH1eUPeGXM pic.twitter.com/RyqqZsxAXn
— New York Post (@nypost) November 25, 2024
Le procès se déroule en moins d’un an, notamment parce que Lyle n’est plus autorisé à témoigner. La raison ? L’aîné s’est confié à une certaine Norma Novelli, qui a publié l’ouvrage Le journal intime de Lyle Menendez – Dans ses propres mots !. On découvre dans ce livre que Lyle s’est dit prêt à pleurer pour émouvoir le jury et semble faire preuve de manipulation pour que le verdict aille dans son sens. A la même époque, son ex-fiancée déclare que celui-ci souhaitait la payer contre son faux témoignage. Ce schéma avait déjà été opéré par Lyle sur un ancien ami lors du premier procès. Son avocate refuse de le représenter et Erik, moins affirmé que son frère, se retrouve seul à la barre.
Les accusations d’abus sexuels sont beaucoup moins au cœur des débats et la cour découd peu à peu l’histoire racontée par les deux frères. En mars 1996, le jury vote à l’unanimité pour la perpétuité sans libération conditionnelle, évitant la peine de mort aux jeunes hommes. Les deux frères retournent en prison mais sont séparés jusqu’en 2018.
Une saga criminelle et judiciaire remise sur le devant de la scène en 2024
Si les affaires de meurtre et de cold case sont ultra populaires à la télévision et sur les plateformes, celle des frères Menendez a particulièrement galvanisé le public. En 2023, la série documentaire Menendez + Menudo: Boys Betrayed, Roy Rosselló diffusée sur Peacock indique que l’ancien membre du boys band des années 80 Menudo, Roy Rosselló, affirme lui aussi avoir été sexuellement agressé par José Menendez lors de son adolescence.
Et il y a quelques mois, Netflix diffuse Monstres : l’histoire de Lyle et Erik Menendez dans la même lignée que Dahmer qui avait affolé la toile. Réalisée par le maître de l’angoisse Ryan Murphy, accompagné de Ian Brennan, la mini-série inspirée des faits connaît un véritable succès, portée par son casting. Nicholas Chavez et Cooper Koch interprètent avec justesse Lyle et Erik, tandis que Javier Bardem joue le rôle de José Menendez et Chloë Sevigny celui de Mary Louise Menendez.
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Un documentaire plus informatif, Les Frères Menendez, est ensuite sorti sur le géant du streaming, laissant la parole directement aux frères.
Les avis s’opposent. Une part des internautes soutient le deuxième verdict de 1996, s’appuyant sur la psychopathie des deux fils à papa. L’autre part croit à l’histoire des frères abusés et meurtris toute leur enfance. A l’instar de la superstar Kim Kardashian qui leur a d’ailleurs rendu visite en prison tandis que de nombreuses pétitions en ligne défendent la version de Lyle et Erik.
Depuis plusieurs mois, le dossier a été rouvert. La défense demande la libération des deux frères désormais âgés de 53 et 56 ans et a soumis une demande de grâce auprès du gouverneur de Californie. Des problèmes techniques les ont empêchés de témoigner par visioconférence lors de la dernière audience, le lundi 25 novembre 2024. Une nouvelle audience devrait avoir lieu à la fin janvier.
A l’ère post mee too où la libération de la parole, dont celles des enfants, a engendré une nouvelle perception des violences sexuelles et psychologiques, l’affaire des frères Menendez semble loin d’être bouclée. Rendez-vous donc l’année prochaine.
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Photo à la Une : La famille Menendez dans Monstres : l’histoire de Lyle et Erik Menendez © Netflix