Les grandes collaborations de l’histoire de la mode et du luxe (épisode 1) : Quand La Redoute commença à démocratiser les créateurs en 1969…

Pour bien démarrer la rentrée, Luxus Plus Magazine vous propose une série sur les grandes collaborations de l’histoire de la mode et du luxe. L’occasion de découvrir ou redécouvrir les partenariats artistiques les plus marquants de ces 50 dernières années. Aujourd’hui, retour en arrière vers l’année 1969…

 

1969, année érotique mais pas que… Année historique également avec le premier vol du Concorde, la démission du Général de Gaulle, le concert de Woodstock et le premier pas sur la Lune.

 

Côté mode, un célèbre vépéciste français crée la surprise en décidant d’inviter une créatrice notoire dans les pages de son catalogue pourtant grand public. Une façon de rendre les couturiers accessibles au plus grand nombre.

 

Plutôt audacieux, non ? De l’audace, la Redoute n’en manque pas depuis 50 ans. Emmanuelle Khanh a ouvert le bal d’une longue série de collaborations artistiques entre l’enseigne et les designers de mode.

 

Source : Maison Emmanuelle Khanh

 

Même si le coup d’essai de 1969 n’est au final qu’un coup dans l’eau (il faudra attendre les années 90 pour que la Redoute renoue avec cette initiative), il n’en reste pas moins que l’idée est novatrice à l’époque.

 

Associer une enseigne de distribution avec un créateur célèbre est chose courante aujourd’hui.

 

Le phénomène des collaborations régulières de H&M avec de grands noms de la couture a d’ailleurs un mot valise en marketing pour le désigner : le masstige (contraction de mass market et prestige), c’est à dire la commercialisation de produits hauts de gamme à des prix bas, les rendant donc ainsi plus accessibles à la masse des consommateurs.

 

Pourquoi alors ce choix à l’époque ? Contextualisons l’évènement. Dans les années 60, Emmanuelle Khanh a le vent en poupe. Elle fait partie des premières designers à lancer le prêt à porter en France, avec notamment Sonia Rykiel, dans une volonté de libérer le corps de la femme. Elle déclarera même en 1964 : « La haute couture est morte, je veux designer pour la rue… Une sorte de mode socialiste pour la masse populaire ». Elle n’a pas encore créé sa marque éponyme, mais est la designer que les grandes maisons s’arrachent : Paco Rabanne la réclame, Missoni lui confie une collection.

 

La Redoute de son côté traverse de grands changements dans les années 60 : l’entreprise devient intégralement un distributeur en arrêtant ses activités industrielles, voit dans les progrès du marketing et le développement des moyens de communication une opportunité de croissance forte, et surtout comprend vite que le prêt à porter féminin est une aubaine pour une société de consommation où la femme se libère et libère aussi son porte-monnaie.

 

Elle en fera donc son fer de lance. De là à associer son image avec celle d’Emmanuelle Khanh, il n’y a qu’un pas. La designer signera pour la Redoute une garde-robe d’hiver faite de manteaux courts et cintrés.

 

Source : La Redoute

 

Depuis lors, c’est plus d’une centaine de collaborations que la Redoute a accueillie, avec de grands noms de la mode et du luxe, comme Issey Miyake, Azzedine Alaia, Marithé et François Girbaud ou encore Isabelle Marant dans les années 90.

 

Source : La Redoute

 

Comment ne pas d’ailleurs évoquer celle avec Yves St Laurent de 1996 ? 15 000 exemplaires du smoking griffé par le créateur ont été vendus, après de nombreux réassorts, et ce malgré un prix de presque 2000 francs de l’époque.

 

Source : La Redoute

 

Les années 2000 ont mis à l’honneur bon nombre de jeunes créateurs français pas forcément connus du grand public.

 

Un formidable tremplin pour ces stylistes et une confirmation du modernisme de la Redoute dans le choix de ses invités. Wanda Nylon, prix de l’Andam 2016 ; Ines Olympe Mercadal ; Coralie Marabelle, prix du public au Festival de Hyères de 2014 ; Jour/Né; Maison Château Rouge, ou encore Koché, prix Andam 2019 et chouchoute incontestable des défilés aujourd’hui, autant de jeunes pousses prometteuses que l’enseigne a mis en avant dans ses collaborations.

 

Un choix d’initié très stratégique pour la Redoute qui lui permet à la fois de toucher une cible de consommateurs plus jeune et de se légitimer auprès des professionnels de la mode comme un acteur majeur du secteur.

 

Collection La Redoute x Koché – Source : La Redoute

 

Comme avec le très recherché Jacquemus qui en 2014 signe pour la Redoute une collection fidèle à l’ADN de sa propre marque en proposant des silhouettes sobres, structurées, dégingandées et très précises à la fois, fatales mais enfantines en même temps.

 

Source : La Redoute

 

Et 2020 alors ? La Redoute a annoncé cet été quelle serait la collaboration de la rentrée. Ou plutôt les collaborations car cet automne, ce ne sont pas moins de deux marques qui ont été invitées : Sœur d’une part, pour un vestiaire féminin/masculin constitué d’un trench, de chaussures inspirées de la mode masculine et de robes et chemises légères et fluides.

 

La créatrice Vanessa Seward d’autre part qui a imaginé une collection capsule pour la rentrée, composée de jeans à pinces, de blazers et de robes midi.

 

La Redoute persiste et signe donc depuis 50 ans dans une stratégie gagnante, voire même gagnant-gagnant, car ce type de partenariat bien choisi permet à chaque partie d’en retirer un bénéfice manifeste, notamment en termes de notoriété, d’image de marque et de buzz marketing.

 

Une stratégie que bien d’autres enseignes comme Monoprix ont mis en œuvre depuis. Sans pour autant renier sa marque propre (70% de son offre aujourd’hui), la Redoute nous régale depuis 1969 d’un vestiaire de créateurs accessible et démocratise indéniablement la mode.

 

 

Lire aussi > IMMERSION DANS L’EXPOSITION « HARPER’S BAZAAR : PREMIER MAGAZINE DE MODE » AU MUSÉE DES ARTS DÉCORATIFS

 

 

Photo à la Une : JOUR/NÉ x La Redoute

 

 

 

 

 

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