Si la coupe du monde de football fait parler cette année, ce n’est pas seulement pour les matchs attendus et les enjeux, mais plutôt pour des raisons de droits humains.
La Coupe du monde de football 2022 se tiendra au Qatar, du 21 novembre au 18 décembre prochain, avec un match Sénégal-Pays-Bas en ouverture. Mais la Coupe comptera sûrement quelques absents. En effet, Philipp Lahm, membre de la délégation allemande de football, a indiqué dans un entretien accordé à Kicker, qu’il n’accompagnerait pas la sélection allemande au Qatar. L’ex-capitaine des champions du monde 2014, a plaidé des raisons politiques “Je préfère rester chez moi. Les droits de l’homme doivent jouer un rôle plus important dans l’attribution des compétitions.”
Il s’interroge sur les critères de décisions de la FIFA pour accorder le Mondial au Qatar : “Cela ne devrait plus se reproduire à l’avenir. Les droits de l’homme, la taille du pays… tout cela n’a semble-t-il pas été pris en compte.” Il s’adresse également à ses homologues: “En tant que joueurs, vous ne pouvez plus faire comme si vous ne saviez pas.” ajoute-t-il.
Tout d’abord, le pays ne reconnait pas les droits des personnes LGBT (lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres) et punit les relations sexuelles entre personnes de même sexe d’une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison. La Fédération internationale de Football Association en avait connaissance en 2010, au moment d’octroyer les droits au pays d’organiser la Coupe. Les statuts de la FIFA, déjà en vigueur à l’époque, interdisent pourtant toute discrimination à l’encontre des personnes LGBT comme celles que le Qatar a inscrites dans sa législation nationale. En 2020, le Qatar a assuré que le royaume accueillerait les visiteurs LGBT et que les spectateurs auraient le droit de déployer le drapeau arc-en-ciel lors des matches, mais est-ce suffisant?
Droits humains sous silence
Ce n’est malheureusement pas le “seul” problème soulevé. En effet, le Qatar ne jouit pas d’une très bonne réputation en matière de droits humains, notamment ceux des travailleurs migrants, et impose de sévères restrictions de la liberté d’expression et du droit de réunion pacifique.
Selon l’enquête d’Amnesty International, deux millions de travailleuses et travailleurs migrants vivent au Qatar, principalement originaires d’Asie et d’Afrique. Ils travaillent sur les chantiers de construction, mais aussi comme femmes de ménage, chauffeurs de taxi ou serveurs dans des restaurants et des hôtels… mais sont piégés. Officiellement, le pays a supprimé le système de la kafala: un système de parrainage qui obligeait les travailleurs migrants à obtenir un permis pour quitter leur emploi. Mais en pratique, les employeurs ont toujours le pouvoir d’empêcher les travailleurs migrants de quitter le pays.
À ce jour, les employeurs qataris disposent toujours de pouvoirs disproportionnés sur les travailleuses et travailleurs migrants : ils contrôlent l’entrée dans le pays et le droit de séjour de ces personnes et peuvent engager contre elles des poursuites pour “délit de fuite”. Ces dernières se retrouvent ainsi piégées, à la merci de patrons peu scrupuleux et exposées aux dangers du travail forcé. Quant aux milliers de décès de travailleurs sur les chantiers, presque aucune enquête n’a été menée, privant les familles de toute possibilité de justice.
Pourtant, le secrétaire général du Comité Suprême qatari, Hassan Al Thawadi, a pris la parole pour défendre l’organisation du Mondial 2022 lors d’une réunion des Nations du Commonwealth au Royaume-Uni, expliquant que “La puissance de ce tournoi en tant que force pour un héritage transformateur a toujours été notre guide. Pour nous, ce tournoi a toujours représenté bien plus qu’un mois de football”. Toutes les infrastructures construites pour le Mondial, à savoir, le métro de Doha, l’aéroport international de Hamad, les nouvelles routes, les hôtels et les autres installations, comptent bien contribuer de manière significative à la croissance économique du Qatar bien au-delà de la Coupe du Monde. Un pis aller pour un événement qui n’est pas très éthique, ni sur le plan humain, ni sur le plan des droits humains.
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Photo à la Une : © FIFA