Magie et luxe ont en commun bien des choses et tout particulièrement celle d’exceller dans l’art d’émerveiller durablement. Par sa science de l’expérience client, le “Magicien du luxe”, Laurent Beretta exploite ce point commun, que ce soit dans ses spectacles ou au service des marques et entreprises.
Donner vie à un patrimoine culturel historique, transcender le produit, conférer au spectateur un rôle dont il est le héros et le propulser dans une époque révolue comme dans un rêve éveillé, voilà ce que le marketing peut apprendre de sa lointaine cousine, la magie. C’est d’ailleurs ce que propose Laurent Beretta avec ses Soirées Fantastiques.
Dans le cadre prestigieux et intimiste de l’hôtel particulier Alfred Sommier, à deux pas de la Place de la Concorde, le magicien – bilingue, comme on en fait peu à Paris – s’adonne à faire revivre, le temps d’un soir, la mémoire du plus célèbre illusionniste français du XIXe siècle : Robert Houdin.
Magicien en entreprise et conférencier spécialisé dans l’expérience client depuis 15 ans, Laurent Beretta a ceci de particulier qu’il s’est formé à l’illusionnisme autant qu’au marketing, cherchant à comprendre les ressorts émotionnels de ses effets de magie.
En ces temps de profondes incertitudes, Laurent Beretta propose de renouer avec un pouvoir extraordinaire ancré en tout être humain : sa capacité d’émerveillement.
De l’illusionnisme à l’expérience client
Mise impeccable, bonne humeur contagieuse et diction envoûtante, Laurent Beretta est un conteur né. Derrière lui, se dresse tel un paravent de scène une des deux bibliothèques que compte son domicile remplie d’ouvrages plus ou moins rares, anciens et cosmopolites ayant trait à la magie bien sûr mais aussi – c’est plus surprenant – à l’expérience client.
Car de surprise il en est question, quand on voit le parcours impressionnant du magicien : bac scientifique puis école de commerce à Lyon, licence en finance à Boston, option marketing et branding ; MBA maîtrise de gestion à Sup de Co Montpellier ; cursus court en neuromarketing à l’ESSEC ; formation en expérience client auprès de Forrester Research…Mais avec toujours, pour fil rouge, la magie.
Lauréat du Festival de Magie de Monte Carlo (2004), il s’est, à la manière de ses idoles de jeunesse, produit à la télévision, en l’occurrence dans Le Plus Grand Cabaret du Monde de Patrick Sébastien (dès 2002) avant d’être élu Meilleur Magicien dans La France a un Incroyable Talent (2011). Ses performances auprès des grandes Maisons du groupe LVMH mais aussi Hermès, Chanel Haute Joaillerie, Porsche ou encore Cartier lui ont valu le titre de “magicien du luxe”.
Aujourd’hui, le maestro se produit également pour des sociétés d’assurances, des entreprises du BTP… bref, un public autant BtoC que BToB.
Cet art de la prestidigitation a fait irruption dans sa vie à l’âge de 9 ans et ne l’a plus quitté depuis.
Fasciné par les sensations télévisuelles de l’époque Garcimore et Gérard Majax, il trouve au pied du sapin de Noël, le cadeau qui va changer le cours de son destin. Soit un coffret de magie Garcimore.
Il fait l’expérience du miracle de la magie quand sa cousine, le devançant à la lecture des instructions, parvient à faire disparaitre sous ses yeux ébahis “un mouchoir jaune dans un cornet en papier noir.”
“J’ai ressenti cette sensation d’étonnement extrêmement puissant, une sorte de glissement de la réalité comme suspendu dans le temps. Depuis, je n’ai eu de cesse de vouloir faire revivre cette sensation observable chez tout spectateur vivant un effet de magie.”
Enfermé dans sa chambre 7 à 8 h par jour, il répète inlassablement afin de parfaire ses tours devant sa famille et ses camarades.
Grâce à une amie de sa grand-mère, il fait la rencontre de son mentor, Jean Rigal, magicien et lauréat d’un Prix d’invention au Congrès Mondial de la Magie en 1967. A ses côtés, pendant 8 ans il va apprendre l’art de la scène et surtout améliorer drastiquement son anglais, les meilleurs ouvrages de magie étant essentiellement distribués dans les pays anglo-saxons.
Jean Rigal lui fait découvrir du matériel de haute qualité de la Maison japonaise Tenyo ainsi que des revues de magie américaines “dans lesquelles on voyait de grands tours, de grandes illusions, des femmes coupées, en lévitation…”Entre 11 et 18 ans, Laurent ne se souvient pas de lui autrement que s’entraînant tout le temps avec des objets, cartes ou gobelets dans les mains.
Conscient que c’est aux Etats-Unis que l’on se forme le mieux à la magie, il choisit délibérément Boston – malgré la difficulté linguistique requise à l’entrée – pour suivre une licence en finance sans dire à son père que la ville abrite “le plus grand magasin de magie de la côte est ».
S’y rendant tous les weekend jusqu’à vendre lui même du matériel de prestidigitation à d’autres professionnels, il découvre que magie et business peuvent aller de paire grâce au “corporate magic”. Un métier à part entière consistant à travailler pour une convention, une marque et écrire des scénarii de magie, “pour faire passer un message, mettre en avant un produit, un service.”
Dès cet instant, Laurent Beretta comprend que “la magie peut être un vecteur de communication”. Ce sera d’ailleurs le sujet de son mémoire à la sortie de l’école de commerce.
Arrivé à Paris en 1999, il n’a de cesse de démarcher un maximum de personnes et de faire des démonstrations partout où c’est possible, comme à Roland Garros.
Un ami le présente à des Maisons de luxe et c’est un coup de cœur réciproque. “On me demande alors de faire apparaître certains articles qui valent plusieurs millions d’euros, de raconter l’histoire de la marque, de la mettre en scène de manière à ce qu’elle puisse prendre vie sous les yeux des spectateurs. Au lieu de voir le bijou sous cloche, il est mis en lumière. Là, je change une bague en bracelet, ici une parure apparaît en un clin d’œil…”
Cette mise en majesté du produit se rapproche d’ailleurs de l’acte de vente comme il aime le rappeler. “Cette magie qui véhicule des émotions fortes est en fait relativement similaire à un acte de vente, à une façon d’enrober les choses pour faire vivre quelque chose de particulièrement fort et de pouvoir transporter un client avec vous.”
C’est aussi par la magie qu’il découvre des ressorts communs à l’expérience client. “Qu’est-ce que l’effet waouh ? Qu’est-ce que ça implique en termes de perception, de psychologie de l’attention et quelles émotions sont créées ? Comment utiliser ces mêmes émotions dans l’expérience client et ce quelque soit l’entreprise ?”
Une vision documentée et quasi anthropologique de sa discipline reine, comme Robert Houdin de son temps, qui fut le premier à consigner, par écrit, l’ensemble de ses effets de magie.
Robert Houdin ou la rencontre miraculeuse
Le célèbre illusionniste français du XIXe siècle, Robert Houdin, excellait autant dans la puissance de ses effets de magie que dans son storytelling avant l’heure, en particulier la poésie de son “dénouement”, soit le texte qui accompagne ses tours. Il est un des premiers à faire de la magie de salon. Extrêmement novateur dans la forme et les numéros proposés, il a inspiré bon nombre de magiciens anglais et américains.
Robert Houdin a commencé son spectacle sous les arcades du Palais Royal en 1845 avant d’aménager un appartement en salle de spectacle jusqu’en 1852. Achetant un théâtre, il déménage sa magie de salon boulevard des Italiens : le théâtre des soirées fantastiques était né.
Dans ses spectacles, il fait apparaître des livrets (prenant la forme pour les messieurs, un carnet et les Dames, un éventail) et les offre à son public. Chaque expérience de magie y est méticuleusement décrite.
Pourtant, le nom de ce magicien extraordinaire semblait relégué aux oubliettes de l’histoire au profit de son plus célèbre collectionneur et admirateur, le cinéaste Georges Méliès et de l’américain Houdini.
En effet, avant de réaliser Voyage dans la lune (1902) et une pléthore d’autres chefs-d’œuvre, Georges Méliès était lui-même un magicien-né. Cependant, dans son film d’animation Hugo Cabret (2011), Martin Scorsese donne vie à Méliès, Houdin n’est évoqué qu’à travers un oiseau automate.
Et c’est surtout son admirateur et disciple américain – Houdini – qui est resté dans les mémoires contemporaines.
C’est pendant le confinement que Laurent Beretta fait la découverte ou plutôt la redécouverte de Robert Houdin. En effet, à 10 ans, il avait découvert son ouvrage “Comment on devient sorcier”. “ Ce traité qui n’a rien d’un livre de sorcellerie, explique comment on manipule des objets, des balles de cristal, des cartes à jouer, des pièces, le tout, accompagné du boniment de l’époque.”
En 2020, Laurent Beretta découvre la collection d’ouvrages dédiée au célèbre illusionniste en quatre tomes que lui dédie le producteur cinéma et grand collectionneur, Christian Fechner. L’auteur y détaille tout l’univers de Robert Houdin ainsi que le contenu de ses Soirées Fantastiques.
“A la lecture du livre, je me suis dit qu’il était bizarre que Robert Houdin ait tout juste droit à une plaque commémorative rue de Valois et pas un seul spectacle digne de ce nom en son honneur à Paris.”
Laurent Beretta se met alors en tête de ressusciter les Soirées Fantastiques de Robert Houdin et de faire revivre le spectacle “tel qu’on pouvait le voir au XIXe siècle.” A cette fin, il rend visite à l’académie de magie, la Maison d’édition à l’origine de la série d’ouvrages sur le célèbre illusionniste. Familier avec le patron des lieux, celui-ci lui confie “Si tu arrives à refaire ne serait-ce que 10% de ce qu’il y a dans ce livre, ça pourrait être un très grand succès.”
Laurent Beretta en est convaincu, le spectacle de jadis est enfin à sa portée…Seul hic : les soirées fantastiques reposaient sur des automates aux mécanismes complexes et dont les originaux sont à Las Vegas, devenu entre-temps propriété du magicien américain David Copperfield.
Dans ces conditions, comment parvenir à recréer cette magie d’un autre temps ?
Le voyage impossible ?
Une cliente, désireuse de fêter son anniversaire Place Vendôme dans l’Hôtel d’Evreux, laisse carte blanche à Laurent Beretta pour tester son spectacle. Puis c’est le Ritz Paris voisin qui se laisse tenter par une représentation.
Finalement, désireux d’un lieu historique et intimiste, non loin du Théâtre de Robert Houdin, le choix se porte sur l’Hôtel particulier XIXe siècle Alfred Sommier. Le magicien met à contribution la direction de l’établissement. En l’occurrence Richard de Warren, le descendant des propriétaires de l’hôtel cinq étoiles, introduit chaque soir les spectateurs à l’histoire des lieux et de ses ancêtres tandis que le magicien, arrive vêtu d’un frac et d’un élégant haut-de-forme.
Entre-temps, Laurent Beretta fait la rencontre d’un club de passionnés de Robert Houdin – et donc de mécanique. Grâce à eux, des tours qu’il pensait impossibles se mettent à prendre vie, tel le Pâtissier du Palais Royal ou encore l’Oranger Merveilleux. Quant à l’oiseau chanteur, il est l’œuvre d’un américain.
Le spectacle peut commencer sous les ors du salon.
Surgissant d’une porte, d’un rideau ou d’une discrète alcove, Laurent Beretta s’élance. Gestuelle, débit et ton sont mesurés et précis, et le magicien captive la salle par son récit et ses différents effets… de magie.
Des bijoux disparaissent pour réapparaître sous une autre forme plus loin, là, la pâtisserie secrètement désirée par un participant sort tout juste du four. Ou des fruits poussent sur un oranger aux premières lueurs de l’été. Les heures filent et l’histoire de la magie défile sous les yeux.
A la sortie, comme lors du premier essai du magicien à l’Hôtel d’Evreux, le public est conquis.
Force est de constater que si les effets de magie et les automates font merveille, ce n’est rien comparé à cette sensation qui en découle. Le temps de la représentation, le spectateur est comme happé dans un souvenir mémoriel plutôt diffus, dont il ressort enchanté… et rajeuni : c’est donc ça, le retour de sa capacité d’émerveillement.
Les Soirées Fantastiques : les 12 et 22 décembre prochains – autres dates à venir en 2024, notamment pendant les Jeux Olympiques et paralympiques de Paris.
Hotel Alfred Sommier,
20 rue de l’Arcade,
75008 Paris
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Photo à la Une : © Les Soirées Fantastiques