Les Swings States de nouveau au coeur des élections américaines

Alors que la campagne présidentielle américaine opposant Donald Trump et Kamala Harris redouble d’intensité avant l’Election Day du 5 novembre, les Swing States ou “États pivots”, sont une nouvelle fois appelés à jouer les faiseurs de roi ou de reine de l’élection. Elon Musk, vif soutien à Donald Trump, l’a bien compris au point de vouloir faire pencher la balance en faveur de son champion grâce à une loterie des plus contestées. 

 

Ils sont au nombre de sept. 

 

Ils ont pour nom le Nevada, l’Arizona, le Wisconsin, le Michigan, la Pennsylvanie, la Caroline du Nord et la Georgie. 

 

En tout sept états indécis ou Swing States – sur les 50 que compte le pays – dans la course pour la Maison Blanche et qui pourraient faire pencher d’un côté ou de l’autre l’élection présidentielle américaine du 5 novembre prochain. 

 

Dans ces contrées plus ou moins reculées de l’Amérique, les candidats s’invectivent par tweets et opérations de communication interposées pour tenter de convertir chaque Swing State en bastion électoral pour son propre camp. Ainsi, quand la vice présidente de Joe Biden, Kamala Harris écrit en visite en Géorgie que Donald Trump était “épuisé, instable et inapte à être président des États-Unis”, l’impulsif candidat républicain à la houppette blonde attaque la candidate démocrate sur son CV, contestant son job étudiant à Mcdonald’s et se mettant lui-même en scène, tablier et casquette vissée sur le crâne pour servir frites et hamburgers à des clients incrédules à Feasterville, en Pennsylvannie. 

 

Il faut dire que le scrutin électoral américain est atypique pour un occidental. En effet, il suffit de gagner 270 grands électeurs pour remporter l’investiture présidentielle tandis qu’obtenir la majorité des voix, importe peu. Elon Musk, le patron de Tesla, X et Space X (entre autres) tente lui aussi de faire pencher les résultats en instaurant une loterie, dont la légalité interroge à destination des résidents de ces fameux Etats clés dans cette élection. 

 

Winner Takes It All

 

Qui de Donald Trump ou de Kamala Harris accèdera à la Maison Blanche ? 

 

Les Etats-Unis s’apprêtent à élire le 47e président des Etats-Unis, voire la première présidente de leur histoire, depuis le désistement de Joe Biden en juillet pour raison de santé au profit de sa vice-présidente. Une entrée en lice tardive face un Donald Trump qui avait officialisé sa candidature dès le 15 novembre 2022. 

 

Mais aux Etats-Unis, plus qu’ailleurs, pour arracher la victoire, il faut remporter suffisamment d’Etats pour la majorité des grands électeurs, en l’occurrence 270. 

 

Le collège électoral, héritage des pères fondateurs de la déclaration des Etats-Unis d’Amérique, mis en place dans la Constitution de 1787, est encore en vigueur, alors qu’il a été totalement ou partiellement abrogé ailleurs. Le dernier en date à l’avoir supprimé a été l’Argentine en 1994. En vertu de ce système, le président des Etats-Unis est élu au suffrage indirect

 

Dans les grandes lignes, les citoyens votent pour des grands électeurs. Chaque Etat se voit attribuer un nombre de grands électeurs en fonction de sa population. Ledit nombre correspond au nombre de représentants que l’Etat pourra envoyer au Congrès. Ainsi, si la Californie dispose de 39 millions d’habitants, elle possède 55 grands électeurs tandis que le Vermont et ses 626 000 habitants en dispose de 3. 

 

Autre leg de 1787, le système dit du “Winner Takes All” (le gagnant emporte tout) fait que le candidat qui remporte le plus de voix dans un État, remporte tous les grands électeurs de cet État. Ce modèle est devenu prédominant au XIXe siècle dans la mesure où il favorisait un système de vote qui mobilise les électeurs autour de candidats spécifiques. Seuls les Etats du Maine et du Nebraska n’ont pas adopté ce modèle. En 2016, ce système a permis à Donald Trump de l’emporter avec 304 grands électeurs malgré 3 millions de votes en moins que sa rivale Hilary Clinton. 

 

La Pennsylvanie en ligne de mire

 

Dans la dernière ligne droite vers la Maison Blanche, un Etat se démarque plus que les autres : la Pennsylvanie. Fort de plus de 19 millions d’habitants et de ses 19 grands électeurs, le Swing States, le plus proche géographique de Washington et de New York, est clairement l’endroit où l’élection américaine s’est souvent jouée. Donald Trump s’y était imposé sans difficulté en 2016, avant que Joe Biden ne l’emporte par 81 000 votes seulement en 2020

 

Au point que comme le rappelle le New York Times “Kamala Harris et Donald Trump consacrent plus d’argent, de temps et d’énergie à faire campagne en Pennsylvanie que dans n’importe quel Etat américain”. Ainsi, quand Kamala Harris a présenté son programme économique c’était à Pittsburgh, quand elle a annoncé le nom de son colistier, elle était à Philadelphie et quand elle a choisi le lieu du meet d’automne de Barack Obama, elle a opté pour Pittsburgh. De son côté Donald Trump a prévu de dépenser près de 350 

 

L’ex président des Etats-Unis compte bien peser dans cet Etat du nord en déclin industriel, en particulier dans les zones rurales. Kamala Harris, de son côté, bénéficie du soutien des grandes villes de l’Etat que sont Philadelphie et Pittsburgh. 

 

Mais les électeurs de cette capricieuse contrée ne sont pas si faciles à amadouer

 

La campagne est si serrée que Radio Canada rappelle que trois communautés pourraient bien faire et défaire les rêves de victoire, avec en toile de fond l’invasion en Ukraine et surtout le conflit à Gaza. 

 

La communauté juive (300 000 personnes) est traumatisée par les attaques du Hamas du 7 octobre 2023 et perclus de doutes face à un camp Biden-Harris trop timide quant à la condamnation des actes antisémites dans les campus américains. La communauté musulmane (150 000 personnes) menace de voter en faveur du camp vert si les Etats-Unis poursuivent leurs ventes d’armes à Israël. Enfin, les ukrainiens (100 000 personnes), même s’ils apprécient la livraison d’armes par l’administration Biden, voient avec intérêt la promesse de négociation de paix de Donald Trump avec Vladimir Poutine. 

 

Elon Musk au secours de Trump

 

Au départ réticent vis-à-vis de Donald Trump, Elon Musk a commencé à soutenir le candidat républicain depuis son investiture en 2016, saluant ses propositions pro-business. Le patron de Tesla et de Space X a ainsi notamment été membre de plusieurs conseils consultatifs de Donald Trump. Mais il a également quitté ces conseils en raison de désaccords sur certaines politiques, comme le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat.

 

C’est à la suite de la tentative d’assassinat de Donald trump, en juillet dernier, que le sulfureux homme d’affaires a décidé d’afficher publiquement son soutien à l’ancien président. 

 

A cette fin, il a créé l’America PAC, une organisation politique de soutien au candidat républicain. Elle s’apparente à “un comité d’action politique” (PAC) qui soutient les candidats aux élections via des campagnes publicitaires ou des événements publics grâce aux dons réalisés par des particuliers ou des entreprises. 

 

Mais surtout, via cette structure, Elon Musk a organisé une loterie récompensant deux électeurs de Pennsylvanie d’un chèque d’un million de dollars, chacun. 

 

L’homme d’affaires s’est en effet engagé à faire gagner par tirage au sort cette coquette somme chaque jour du 19 octobre au 5 novembre à des citoyens inscrits sur les listes électorales d’un des 7 swing states. L’autre condition sine qua none étant de signer une pétition conservatrice en faveur du 1er et du 2nd amendement, correspondant respectivement à la liberté d’expression et au port d’armes. 

 

Or, selon plusieurs médias américains cités par l’AFP, le ministère de la justice a retoqué sa démarche par un mail adressé aux équipes d’Elon Musk. Celui-ci a alors rappelé qu’il est “illégal d’offrir une récompense de valeur à un citoyen pour voter ou pour s’inscrire sur les listes électorales.”

 

Si le ministère n’a pas mentionné d’action légale contre le milliardaire originaire d’Afrique du Sud, il a tout de même rappelé dans son mail les peines encourues pour ce qui s’apparenterait à du vote buying (achat de voix). Ainsi, le ministère rappelle que « quiconque paie, offre de payer ou accepte un paiement pour s’inscrire sur les listes électorales ou pour voter est passible d’une amende maximale de 10 000 dollars ou d’une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans, ou les deux à la fois ».

 

En dépit de cette mise en garde, CNN a relevé que ce 25 octobre, deux nouveaux chèques d’un montant similaire ont été émis par l’America PAC en faveur de deux familles, cette fois-ci du Michigan et du Wisconsin. 

 

A noter que Elon Musk a sans doute trouvé une zone grise : il n’achète pas de vote, mais récompense de façon aléatoire l’inscription sur les listes électorales et la signature d’une pétition. 

 

Depuis juillet, l’America PAC a récolté près de 75 millions de dollars pour le camp trumpiste. 

 

Lire aussi > Kamala Harris, une nouvelle incarnation du rêve américain ?

 

Photo à la Une : Allison Saeng/Unsplash

Victor Gosselin is a journalist specializing in luxury, HR, tech, retail, and editorial consulting. A graduate of EIML Paris, he has been working in the luxury industry for 9 years. Fond of fashion, Asia, history, and long format, this ex-Welcome To The Jungle and Time To Disrupt likes to analyze the news from a sociological and cultural angle.

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